Un gardien peut-il être un bon capitaine ?

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FOOT - Laurent Blanc a confié le brassard à Hugo Lloris, chez les Bleus. Une bonne idée ?

Après plusieurs mois d’hésitation, Laurent Blanc a finalement décidé de confier le brassard de capitaine au portier de l’Olympique Lyonnais, Hugo Lloris. Préféré à Philippe Mexès ou à Eric Abidal, Lloris sera le "boss" lors du prochain Euro, en Pologne et en Ukraine (du 8 juin au 1er juillet). Mais est-ce qu’un gardien de but peut faire un bon capitaine ? Est-ce que son immobilisme dans la surface de réparation n'est pas handicapant ? Europe1.fr en short vous apporte quelques éléments de réponse.

"Pas bien placé sur le terrain"

Guy Roux a entraîné l’AJ Auxerre pendant plus de 40 ans. L’homme au bonnet n’a jamais confié ce rôle crucial à un goal. Il est formel, il n’est "pas partisan de cette technique". Et d’expliquer : "le capitaine est le ciment de l’équipe. Il doit agir sur tous ses coéquipiers à n’importe quel moment du match. Un rôle que peut difficilement assumer le gardien quand il se trouve cantonné à sa surface de réparation". Cette première observation géographique a effectivement son importance. Comment repositionner son attaque quand on est à 80 mètres de l’action ? Ou comment aboyer ses consignes à tous ses coéquipiers à l'instar d'un Didier Deschamps quand on est scotché derrière sa ligne des 5,50 mètres ?

Ça, c’est pour l’aspect positif du capitaine, le bon leader qu’on écoute et qui tire l’équipe vers le haut. Mais il existe aussi une face un peu moins glorieuse, celle du lobbying auprès des arbitres. Un capitaine doit user d’expérience pour lui mettre la pression et agir avec roublardise pour obtenir de temps à autre un coup franc bien placé ou un carton pour l’équipe adverse. "Regardez l’influence qu’a Mark Van Bommel (le capitaine des Pays-Bas, ndlr) sur l’arbitre", raconte Cherif Ghemmour, journaliste à So Foot. "C’est un génie à ce poste. Il peut se rendre coupable des tacles les plus dangereux et quémander en même temps auprès de l’arbitre". On peut également citer Claude Makelele, excellent dans ce registre. "La dernière année au PSG, il jouait avec un sifflet dans son short", caricature Guy Roux.

Un problème de concentration ?

Si dans l’imaginaire collectif, le gardien est un peu le faignant de l’équipe, la réalité est bien différente au haut niveau. Ce poste nécessite une concentration maximale pendant 90 minutes. La moindre erreur de sa part et c’est la catastrophe. Du coup, remplir les deux fonctions (gardien et capitaine) peut être parfois handicapant. "Quand il porte le brassard, il doit être en alerte en permanence sur tous les secteurs de jeu", estime Guy Roux. "Ça peut nuire sérieusement à sa concentration".

Et pourtant, malgré ces handicaps, de nombreux portiers ont été désignés à ce poste. Des grands joueurs comme Bernard Lama au PSG (pendant près de 4 ans), Pascal Olmeta (2 ans) ou Fabien Barthez à Marseille (3 ans) ont montré qu’ils tenaient la distance à ce poste. Aujourd’hui encore, ils sont quatre dans le championnat de France de Ligue 1 avec ce petit bout de tissu autour du bras : Steve Mandanda (Marseille), Fabien Audard (Lorient), Olivier Sorin (Auxerre) et Teddy Richert (Sochaux). En revanche, il s'agit de la première fois qu'un gardien occupe ce poste en équipe de France.

"Le gardien a une vision globale"

Ce n’est pas Guillaume Warmuz qui pourrait affirmer le contraire. Capitaine de 2000 à 2002 à Lens, il est persuadé que le gardien de but est taillé pour la fonction. "On voit beaucoup mieux le jeu de derrière. Comme un pilote de Formule 1 qui fait corps avec sa voiture, le goal ne fait qu’un avec son équipe. Il est en discussion permanente avec sa défense pour replacer tel ou tel joueur. Et avec un peu d’expérience et de maturité, il doit pouvoir replacer toute l’équipe".

Si Guillaume Warmuz concède qu’il  a effectivement "laissé beaucoup d’énergie dans son rôle de capitaine", il est convaincu que le gardien "a moins la tête dans le guidon qu’un joueur de champ et a, par conséquent, une vision plus globale et une meilleure philosophie de jeu". Pour lui, Lloris fera un "bon capitaine". "Quand on est aussi jeune que lui (25 ans, ndlr) et qu’on a son expérience, on a les épaules suffisamment solides pour être capitaine".