Il a conquis l'Allemagne grâce à son "pied léger", avant de claquer la porte de la Mannschaft sur fond d'accusations de racisme : le meneur de jeu allemand Mesut Özil a annoncé mercredi prendre sa retraite à l'âge de 34 ans. "Ces derniers mois et dernières semaines, après avoir souffert de plusieurs blessures, il est devenu de plus en plus clair qu'il était temps pour moi de quitter ce grand monde du football", a expliqué le champion du monde 2014 dans un long message publié sur Twitter.
L'ancien joueur du Werder Brême, du Real Madrid et d'Arsenal, au cours de sa carrière achevée avec le club turc de Basaksehir, a déchaîné les passions, sur les terrains et en dehors. Il s'était engagé en juillet dernier avec Basaksehir pour une saison, après un passage délicat à Fenerbahçe où il était entré en conflit avec sa direction. Özil avait déjà fini au placard à Arsenal, son précédent club.
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Des débuts en apothéose
L'histoire avait pourtant bien commencé : "C'est le nouveau numéro dix de l'Allemagne", claironnait le magazine Stern en juin 2010 au sujet du gamin de la Ruhr. Né de parents turcs, le meneur de jeu et son équipier germano-tunisien Sami Khedira font des merveilles au Mondial sud-africain, dont l'Allemagne termine troisième, et ne tarde pas à être érigé en symbole d'une Allemagne multiculturelle.
Une photo synthétise la belle histoire : torse nu et tout sourire, Özil serre la main de l'ex-chancelière Angela Merkel. Après le Mondial, Özil signe au Real Madrid, tremplin vers le triomphe allemand de 2014 au Brésil, où il sera paradoxalement moins séduisant qu'en Afrique du Sud. Ses longs cheveux ont disparu au profit d'une coupe plus sage, l'Allemand prête son image à Adidas.
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"J'ai deux cœurs"
Mais sa carrière connaît un tournant en mai 2018: Özil et son équipier de la Mannschaft Ilkay Gündogan, lui aussi d'origine turque, posent à Londres en compagnie du président turc Recep Tayyip Erdogan, en pleine campagne pour sa réélection. Le cliché fait polémique, alors que Berlin accuse Ankara de dérive répressive. Le chef d'État turc répond en traçant un parallèle entre l'Allemagne contemporaine et le nazisme. Peu après, l'Allemagne, championne du monde, est éliminée dès la phase de poules du Mondial russe, une humiliation.
Özil devient le bouc émissaire de l'extrême droite. Certains médias allemands l'accablent aussi. Lâché par le président de la Fédération allemande de football, Özil finit par claquer la porte de la Mannschaft en juillet, pour "aussi longtemps que je (ressentirai) du racisme et du manque de respect à mon égard". "Erdogan est le président actuel de la Turquie et je dois montrer du respect à cette personne, quelle qu'elle soit", plaidait-il. Un an plus tard, Özil choisit M. Erdogan comme témoin de mariage lorsqu'il s'unit à une ancienne miss Turquie, Amine Gülse.
Et quitte à dire le fond de sa pensée, il s'indigne du traitement réservé par la Chine à la minorité musulmane ouïghoure. En réaction, la télévision d'État CCTV déprogramme un match d'Arsenal contre Manchester City. Les Gunners prennent alors leurs distances avec Özil, soucieux "de ne pas s'impliquer dans la politique". Sur une voie de garage à Londres, le milieu de terrain avait choisi à 32 ans de vivre sa première expérience en Turquie en rejoignant Fenerbahçe en janvier 2021, avant de rejoindre Basaksehir l'été dernier.