"Sun Yang, il pisse violet". La déclaration du français Camille Lacourt à l'issue de sa finale du 100 m dos, mardi, n'est pas passée inaperçue aux Jeux olympiques. "Ça me dégoûte de voir des gens qui ont triché sur les podiums", insistait-il encore. Ce sont des déclarations "courageuses" pour Fabien Ohl, professeur de sociologie du sport à l’université de Lausanne, invité de la matinale d'Europe 1 mercredi.
"C'est courageux d'avoir parlé comme ça". "C'est courageux d'avoir parlé comme ça. C'est courageux de s'exprimer contre le dopage parce que souvent les gens se taisent", salue Fabien Ohl. "Maintenant, avec les éléments qu'il y a, c'est un peu facile d'accuser systématiquement les Chinois et les Russes", tempère-t-il. Outre le cas de l'athlète chinois Sun Yang, celui de la Russe Yuliya Efimova, médaille d’argent sur le 100 m brasse, fait en effet également débat.
"Ça ne donne pas confiance dans l'antidopage". "Yuliya Efimova a été contrôlée positive a un stéroïde en 2014, elle a purgé sa peine de 16 mois parce que c'était sa première infraction aux règles antidopage", explique le professeur de sociologie du sport. "Ensuite, elle a été prise par rapport au meldonium, mais les recherches sur la durée des effets du meldonium n'étaient pas très claires. Or, le meldonium a été autorisé en 2015 puis interdit le 1er janvier 2016, donc on ne savait pas si les traces de meldonium étaient liées à une consommation avant 2016 ou après", précise-t-il. Mais, "il y a une ambiance quand même assez délétère et ça ne donne pas confiance dans l'antidopage", souligne-t-il. D'autant que, "tant que les gens ne se font pas prendre, on ne peut faire que des estimations" sur le nombre d'athlètes concernés par le dopage.
Vers une sanction à vie ? Face à ces multiples cas de dopage, certains prônent la suspension à vie des athlètes concernés. "Quand on est sûr que les personnes ont pris des produits interdits ou se sont dopées, c'est quelque chose qui me semble très fort, mais évidemment acceptable", explique Fabien Ohl. "Après, comme toute justice, on peut avoir des doutes, avec des produits alimentaires contaminés notamment ou, mais c'est assez rare, des cas de faux positif. Sanctionner quelqu'un à vie alors que l'on a des doutes, ce serait un peu disproportionné", analyse-t-il ainsi.
Des progrès déjà réalisés. En prenant du recul, on peut tout de même noter une amélioration de la situation ces dernières années. "Dans les années 70-80, il y a avait des dopages d'État organisés de façon quasi-systématique dans presque tous les sports", rappelle ainsi Fabien Ohl sur Europe 1. "Il y avait alors une grande tolérance, y compris dans les pays de l'Ouest, face au dopage. Aujourd’hui, ce qui fait scandale, c'est ce dopage d'Etat. Et on voit donc à travers les réactions que ça provoque que les choses ont changé", salue-t-il. "Même si on peut encore douter que tous les sportifs ne prennent pas de produits, on a des pratiques qui évoluent, avec un meilleur suivi des athlètes, un meilleur encadrement", conclut-il.