En cette quatrième semaine de Vendée Globe, Charlie Dalin caracole toujours en tête de la course. Le skipper de 36 ans, qui participe pour la première fois sur son monocoque Apivia, est dans le trio de tête depuis plus d’une semaine. Il vient de rallier l'Océan Indien après avoir franchi le cap de Bonne-Espérance. Une étape particulière puisqu'elle est intervenue dans la nuit du 30 novembre au 1er décembre, jour où le skipper Kevin Escoffier a été obligé de déclencher sa balise de détresse et de se réfugier sur son radeau de survie. Charlin Dalin se confie dans son carnet de bord hebdomadaire sur Europe 1, enregistré vendredi.
Un passage du cap de Bonne-Espérance particulier
"J'avais prévu une photo, une petite vidéo, mais j'étais inquiet à l'idée de vivre ma première dépression australe. Et au moment où je me posais des questions sur ma trajectoire, sur la bonne façon d'aborder cette tempête, je reçois un message de mon équipe qui me dit que 'Kevin [Escoffier] a coulé, il est dans son radeau'. Forcément ça ne m'a pas rassuré et tout de suite, comme tout le monde, je me suis mis à attendre des nouvelles. J'étais trop loin devant pour faire demi-tour, j'aurais mis trop de temps, plus de 24 heures, à revenir sur zone. Si son radeau avait été à côté, je n'aurai pas hésité une seule seconde.
Mais comme il ne m'était pas possible d'aller lui porter secours, je décide de continuer ma route vers le cap de Bonne-Espérance tout en attendant des nouvelles de Kevin. Autant dire que je l'ai passé sans y faire attention. Ce n'était ni secondaire, ni tertiaire, ce n'était simplement pas du tout à l'ordre du jour.
Forcément, le lendemain, ça a été un grand soulagement d'apprendre qu'il avait été sauvé par Jean Le Cam. Et oui, ça amène à se poser plus de questions, notamment sur son rythme.
L'océan Indien, "la pire section du Vendée Globe"
D'autant que Michel [Desjoyaux] m'a dit que l'océan Indien est la pire section du Vendée Globe. Et je confirme qu'on est dans mon top des endroits les moins sympas, principalement à cause de la mer. Elle est croisée et très courte, c'est donc très compliqué de faire avancer le bateau, il plante régulièrement. Plus que le vent, je trouve que la mer est le souci numéro un.
Mais l'océan Indien n'a pas que des mauvais côtés : les journées sont très longues, et c'est une bonne chose. La chance qu'on a, c'est qu'il est de coutume de dire que le temps est gris dans ce secteur, mais j'en ai eu très peu. Autre chose marquante, comme je me déplace relativement vite vers l'Est, je traverse les fuseaux horaires assez rapidement et je vois l'heure solaire se décaler tous les jours de 30/45 minutes. Donc tous les jours il fait jour et nuit plus tôt. C'est un marqueur du déplacement sur la Terre qui est intéressant.
Un sommeil difficile à trouver
Reste que la course est éreintante, a fortiori quand il est difficile de trouver le sommeil. Ce n'est pas facile de trouver une position dans laquelle est on bien calé pour s'endormir, le bateau bouge beaucoup, il y a de grosses décélérations quand le bateau plante dans les vagues. Mais, point positif, je commence à manger 'normalement'. Jusqu'à présent j'avais le sentiment de ne pas parvenir à manger assez, mais maintenant c'est réglé et j'ai l'impression de manger comme il faut.
En termes de température, je suis assez épargné pour l'instant. Il fait encore 18 degrés Celsius dans le bateau aujourd'hui. Je n'ai donc sorti ni le bonnet, ni les gants ! J'imagine que je vais avoir à le faire, mais pour l'heure je ne souffre pas du froid.