C'est une ministre plutôt discrète. Au sein du gouvernement, l'ancienne nageuse Roxana Maracineanu est chargée des Sports depuis six mois. Une nouvelle vie, avec une fonction qui est un véritable "travail", "très enthousiasmant", avec "un pilotage de tous les jours". Invitée de l'émission "Face aux auditeurs" diffusée dimanche 24 mars à 20 heures, l'ancienne nageuse vice-championne olympique détaille sur Europe 1 sa position sur des dossiers parfois sensibles, comme le cas Adrien Rabiot ou la polémique sur le hijab de Decathlon, ou des sujets au long cours, comme les JO de Paris ou l'argent dans le football. Morceaux choisis.
Sur le hijab de Decathlon
"Il y a toujours une réponse simple à un problème complexe et ce jamais n'est la bonne. Il y a des gens qui veulent venir faire du sport et qui n’ont pas l’accueil qu’ils devraient avoir. Ce qui a offusqué, c'était que ça soit un magasin vendant des articles de sport qui puisse mettre ça en avant alors que ce n'était pas un magasin religieux. Je suis pour la démocratisation du sport, qu’on ait la tête couverte ou pas couverte. Mon objectif, en tant que ministre des Sports, est d'aller chercher les gens et qu'en amenant les gens comme ils sont, avec ou sans voile, petit à petit, en leur permettant de vivre une mixité sociale. C'est comme ça qu'on va pouvoir œuvrer pour les valeurs de la République."
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Sur le cas Adrien Rabiot
"Je n’ai pas ce pouvoir là" (de défendre Adrien Rabiot face au PSG). On ne peut pas tout faire parce que les journées ont 24 heures et, surtout, on ne peut pas intervenir. Ce n’est pas parce qu'on est ministre des Sports qu’on peut intervenir dans le sport professionnel ou sur des cas bien particuliers. Ce sont des choses à régler entre le club et cette personne, cette famille, et plus largement avec la ligue de football. (Sur une éventuelle injustice exprimée par Véronique Rabiot) Elle a droit de l’estimer."
Sur la baisse du budget des sports de 6%
"La création d’une Agence nationale du sport, courant avril, a permis de répartir l'argent différemment, en séparant ce qui est dédié au haut niveau de ce qui est consacré à la pratique pour tous. (…) Sur le haut niveau, on a réussi à dégager 30 millions d'euros de mesures nouvelles malgré des chiffres qu'on pouvait lire en baisse. Cette baisse était fictive, on avait surévalué une ligne liée à l’Urssaf pour payer les charges des arbitres et des juges. Les charges étaient sujettes à une diminution, le ministère devait les compenser, et en fait, ç'a été surévalué. Cet argent a été réparti entre les autres ministères.
Sur les insultes dans le football
"J'étais au match OM-PSG [Paris Saint-Germain-Olympique de Marseille au Parc des Princes, dimanche 17 mars, NDLR] et je ne vais pas répéter ici les insultes que j’entends dans les cris des supporters, qui sont soi-disant là pour encourager leur équipe alors qu'ils passent leur temps à dire des insanités sur l'autre équipe. On se permet dans le milieu du football de faire des choses qu’on ne peut pas se permettre par ailleurs. On est en train de réfléchir avec la présidente de la Ligue [Nathalie Boy de la Tour] et le président de la Fédération [Noël Le Graët] comment on peut faire : on va bientôt réunir les instances du supportérisme et je vais évidemment porter ce message. Les supporters sont des éléments très importants dans un stade de foot (…) mais on ne peut pas se permettre de se dire qu'on va emmener nos enfants au stade et entendre de telles choses. Ce n'est juste pas admissible."
Sur l'argent dans le football
"Oui, il y a trop d’argent dans ce secteur là du football [professionnel, NDLR], pas seulement sur les salaires, mais aussi sur les prix auxquels sont vendus les matches. Cette concurrence est finalement stérile parce qu'on va arriver à ce que plus personne n'ait accès aux matches", en raison selon elle de la surenchère au niveau des droits télé. (…) Si je me mets à la place des sportifs, c’est super de gagner des millions. Après, ça dure un certain temps, (…) mais il n’y a pas que ça dans la vie. (…) Les footballeurs ne sont pas forcément les plus heureux en lien avec l'argent qu'ils gagnent parce que ce n'est pas en lien direct avec ce que peut procurer le sport."
Sur le retour de Florent Manaudou
"C'est sûr que ça ne va pas être simple, parce qu'il s'est arrêté pendant trois ans. Ça lui a permis de prendre un peu de hauteur, de se mettre à un autre type de sport, le handball, qui lui permet sûrement voir les choses un peu différemment. Mais il ne faut pas minimiser le fait que les autres qu'il va rencontrer à Tokyo ont continué, eux, à s’entraîner. Lui aura le gain de l’expérience, mais les autres peut-être plus l'avantage de la motivation et du fait qu'ils n'ont encore rien en poche, alors que lui a déjà ce magnifique titre de champion olympique. Il a découvert d’autres choses qui, parfois, te font dévier de la cible finale. S'il s'est mis à se ré-entraîner sérieusement, comme c'est une discipline qui ne demande pas énormément d'entraînement ou des heures d'efforts continus, avec ses qualités physiques, il va pouvoir revenir rapidement à un très bon niveau."
Sur les nouveaux sports des JO 2024
"Le fait que ce soit quatre disciplines qui puissent être quasiment pratiquées en plein air, avec des équipements pas trop coûteux, visibles et accessibles à tous pour dire que les Jeux sont pour tout le monde [a pesé dans cette décision]. On voulait des épreuves nouvelles, innovantes. On veut sortir des frontières olympiques et du sport. On allait pousser les portes de ces sports identitaires pour insuffler un peu d’olympisme. Le breakdance, Ça me parle beaucoup, parce que je suis très contente qu'il y ait la notion de musique et de rythme qui rentre en jeu dans le sport."
Sur la comparaison entre sport et politique
"Depuis septembre, je suis en compétition tous les jours. Ce sont vraiment des épreuves pour moi parce que c'est un autre niveau que la vie que j'avais l'habitude de mener. (…) C’est une masse d’information énorme, il faut arriver à discuter avec des gens qui ne parlent pas exactement comme moi. (…) En natation, il y avait ce mouvement répétitif. Au contraire, là, il n'y a pas une seconde pareille que la seconde précédente. Parfois, on est démoralisés, ça n'aboutit pas aussi vite qu'on aimerait, mais ce n'est pas comparable."