C'est le mal invisible contre lequel se bat le rugby depuis plusieurs années : les commotions cérébrales ont doublé chez les joueurs les cinq dernières années. A quelques heures de la petite finale de la Coupe d'Europe vendredi soir, et la grande, samedi, entre le Racing et Leinster, Europe 1 fait le point sur cette conséquence d'un rugby qui se veut de plus en plus violent, et de plus en plus physique.
Pas moins de 102. C'est le nombre de commotions cérébrales - un traumatisme au cerveau consécutif à un coup, pas forcément à la tête - qui ont été recensées en championnat la saison passée. Un score exceptionnellement élevé. Et l'on observe cette augmentation aussi bien chez les pros, que chez les amateurs, qui reproduisent ce qu'ils voient en Top14.
Parole, équilibre et préhension altérés. "Ce choc a occasionné une faille au sommet de mon cervelet, et le sang a coulé comme une hémorragie pendant une demi-heure", explique Maxime Villalongue, 26 ans, joueur en quatrième division, victime de deux chocs très violents. "Pendant ces 30 minutes, j'ai pu continuer à jouer parce que je n'ai pas senti l'hémorragie. Le sang avait pris toute la place à l'intérieur du cerveau. C'est là que j'ai commencé à vomir, ne plus pouvoir parler, voire marcher". Maxime a dû être hospitalisé pendant un mois et pourrait bien garder des séquelles à vie. "Mes fonctions altérées sont la parole, l'équilibre et la préhension, je ne peux pas écrire. On n'a jamais été sensibilisés à ce genre de problème", déplore-t-il.
"Le syndrome du deuxième impact". Si les joueurs professionnels commencent à être suivis par des neurologues pour prévenir les problèmes liés aux commotions cérébrales, chez les amateurs tout reste à faire. "A l'école de rugby je n'en ai jamais entendu parler. On a toujours su que les caillots arrivaient, mais jamais je n'ai entendu parler des conséquences, des séquelles que l'on pouvait avoir suite à une commotion cérébrale", témoigne au micro d'Europe 1 Maxime Villalongue. Comme lui, beaucoup de joueurs ignorent "le syndrome du deuxième impact", deux commotions rapprochées dans le temps.
Un carton bleu. Au moment de la deuxième commotion, "les effets neurologiques sont énormément plus importants que ne le laisse préjuger la sévérité de l'impact, avec le plus souvent un coma ou une crise d'épilepsie incontrôlée" révèle le neurochirurgien David Bauge. "Sur ces événements, le taux de mortalité rapporté est d'environ 50%". "Lorsqu'on reconnaît ou suspecte une commotion cérébrale, le joueur doit sortir de façon définitive", avance le médecin.
Mais là encore la règle est très mal appliquée : chez les pros, la pression du résultat prime souvent sur la santé des joueurs. Quant aux amateurs, c'est encore pire : il n'y a pas de médecin pour contrôler l'état des rugbymen. Voilà pourquoi la Fédération pourrait doter les arbitres d'un carton bleu la saison prochaine dans les divisions inférieures pour forcer les joueurs commotionnés à quitter définitivement le terrain.