"Je n’ai pas pu retenir mes larmes." L’émotion était immense pour Thomas Coville, dimanche soir après avoir franchi la ligne d’arrivée de son tour du monde en solitaire. Le navigateur est désormais le nouveau détenteur d’un record mythique, en moins de 50 jours (49j, 3h, 7’, 38’’). "Ce n’est pas une émotion où vous explosez de joie, comme quand on marque un but. C’est quelque chose qui est très dense, c’est une sensation très lourde, presque, qui d’un seul coup te submerge", explique-t-il à Europe 1. "Juste après Ouessant, je me suis arrêté, c’est la première fois que ça m’arrivait. Je me suis mis à genou dans mon cockpit et pendant quelques minutes, j’étais tellement ému, j’ai pleuré. Voilà. Je voulais ça depuis tellement longtemps".
"Une pression absolument incroyable". Et à en croire le marin, les derniers jours ont été les plus éprouvants. "C’est plus l’angoisse qu’il se passe quelque chose techniquement qui m’empêche d’aller au bout, qui me mettait une pression absolument incroyable", explique-t-il. "Tout cela, mélangé à beaucoup de fatigue, évidemment, parce que là je suis en carence de sommeil. Là, je ne peux pas tellement aller plus loin physiquement", rigole-t-il, ouvertement exténué.
"Une très, très belle histoire". "C’est un très grand jour pour moi en tant qu’athlète, en tant qu’homme. Parce que c’est une belle histoire, une très, très belle histoire", poursuit Thomas Coville. "Celle d’un homme qui au bout du compte, un peu comme le mythe de Sisyphe, un jour il y arrive." Car le marin veut évoquer plus que ses 49 jours en mer. "49 jours, ça peut paraître très abstrait. Ce que je retiendrai, c’est d’avoir tenté ça cinq fois, d’être tombé, de m’être redressé, d’avoir cassé, d’avoir reconstruit, d’avoir des gens comme Sodebo qui m’ont fait confiance."
"J'ai accepté de me faire aider". Et surtout d'avoir accepté de l'aide extérieure. "Le déclic est né au moment de la route du Rhum, quand j’ai percuté un cargo. Donc c’est allé très loin parce que c’est un traumatisme très fort, vous avez un immeuble qui vous rentre dedans. Et donc j’ai accepté que pour que ça change, il faut changer des choses. Et que jusqu’à présent j’avais, par culture ou par éducation, voulu trouver des ressources en moi et seulement en moi", raconte-t-il. "Là, j’ai accepté de me faire aider, par une femme, une Néo-Zélandaise, qui fait de la préparation pour débloquer des choses, qui sont liées à la culpabilité, à ce que vous étiez petit garçon, à ce que vous être aujourd’hui, ce que vous étiez avant et où vous voulez vous projeter. Et toutes ces petites choses, elles font la différence à un moment donné pendant le parcours. C’est indicible, mais c’est ça qui fait basculer", assure le navigateur.
"Mon rêve va peut-être déclencher d'autres rêves". Surtout, l’homme a un message à faire passer. "C’est un peu ça que j’ai envie de dire aux gens : ne vous laissez pas prendre par ce climat, par des gens qui essayent de vous faire croire que demain ce sera pire, que les rêves, c’est inaccessible, que l’autre fait peur", lance Thomas Coville "Parce que ça c’est leur fonds de commerce à eux. Moi, mon fonds de commerce, c’est que les rêves, ça peut marcher. Et que mon rêve va peut-être déclencher d’autres rêves. Et c’est ça qui me fait 'triper' aujourd’hui, et qui fait que j’ai l’impression, en tant qu’athlète, d’avoir fait quelque chose de bien. "