Le 21 août dernier, au dernier jour des Jeux olympiques de Rio, Estelle Mossely et Tony Yoka s'embrassaient en bas du ring. Ce couple de champions olympiques, enveloppé dans le drapeau bleu-blanc-rouge, a fait rêver plus d'un téléspectateur. Et il semble que leur belle histoire et les six médailles remportées par la boxe tricolore au Brésil aient donné un coup de fouet à la discipline en France. La pratique de la boxe se démocratise à tel point que, depuis la rentrée, les clubs sont saturés.
Un nombre de combattants en nette augmentation. Depuis la fin des Jeux, les clubs ont été assaillis de coups de téléphone et de demande d'inscriptions. Depuis la rentrée, le nombre de licenciés a augmenté de 14,4% par rapport à la même période l'année dernière, ce qui représente plus de 3.000 licenciés supplémentaires. Pour un sport de combat comme la boxe, c'est un chiffre très important. Et cette tendance est perceptible sur l'ensemble du territoire, avec des débutants qui sont principalement des femmes et des enfants. Dans la foulée des succès d'Estelle Mossely ou de Sarah Ourahmoune, médaillée d'argent à Rio, le nombre de femmes pratiquant la boxe a augmenté de 24% en quelques semaines seulement.
Beaucoup de préjugés sont tombés. Grâce à l'exposition médiatique dont a bénéficié la boxe à Rio, beaucoup de préjugés sont tombés. "Avant, on avait des stéréotypes : les filles venaient à la boxe d'abord pour perdre du poids, donc on avait des personnes pas très sportives", explique Emmanuel Dos Santos, le responsable du club de Garges-Les Gonesses. "Mais là, ça a changé, ce sont des gens qui viennent chercher de la compétition. Elles ont vu à la télévision des filles belles, intelligentes, qui ont des vies professionnelles et familiales intéressantes et ça leur a montré par l'exemple que c'était aussi possible pour elles."
C'est ce qui a décidé Amel à se lancer. Il y a quelques semaines, elle aurait été effrayée à l'idée de monter sur un ring par peur de se blesser et ne pas pouvoir poursuivre ses études. Mais aujourd'hui, grâce à l'exemple d'Estelle Mossely, elle ne craint plus rien. "Je fais aussi des études d'ingénierie à côté et j'ai vu qu'elle pouvait le faire. Donc je me suis dit 'Pourquoi pas ?' À la base, je ne voulais pas faire de compétition, je voulais juste m'entraîner comme ça. Mais maintenant, elle m'a vraiment donné envie de faire des compétitions. Donc pourquoi ne pas débuter l'année prochaine ?"
Plus de moyens pour répondre à une demande massive.Face à cet afflux d'inscriptions, les clubs ont dû s'organiser. Il a fallu débloquer de nouveaux créneaux horaires ou encore acheter du matériel supplémentaire. Des dispositions pas toujours simples "d'autant plus qu'on manque de place et d'entraîneurs" explique Emmanuel Dos Santos. "C'est vrai que la salle est très, très remplie. Moi je suis le seul entraîneur et ça peut être compliqué à gérer quand on est plus de 50 dans la salle. Mais bon, ça reste positif. On a été pendant très longtemps peu médiatisés, mais là on a de très bons exemples. Ça va peut-être nous permettre d'avoir un second coach ou un troisième pour ces nouveaux profils."
Un coup de pouce de l'État. Pour aider les clubs les plus saturés, la Fédération française de Boxe démarche les mairies pour obtenir des salles plus grandes et des subventions supplémentaires. Mais bien souvent, la réponse est "On n'a plus de place, plus d'argent". Alors Patrick Kanner, ministre de la Ville, de la Jeunesse et des Sports a pris les choses en main. Il promet que l'État va donner un coup de pouce : "Dans le cadre des crédits qui sont les miens, dans le cadre de la rénovation urbaine, il est clair que, dans les équipements sportifs à promouvoir, il faut développer la création d'équipements des sports de combat en général. On a sûrement une pépite et si vous la laissez sur le côté, elle va s'éteindre. Donc il faut garder la flamme en la matière et pour un sport olympique, c'est tout à fait ce qu'il faut". Il faut entre huit à dix ans pour former un champion. Alors s'il l'on veut que la boxe tricolore brille à nouveau aux prochains JO, tout se joue maintenant.