Il y a encore du chemin à faire en matière d'égalité des sexes dans le sport. Alors qu'il évoquait le bilan sportif (d'ailleurs positif) de l'équipe de France féminine, le président de la Fédération française de football (FFF), Noël Le Graët, s'est fendu d'une remarque sexiste qui n'a pas échappé à notre éditorialiste Virginie Phulpin. Une sortie en apparence anodine, mais qui en dit beaucoup sur des clichés encore solidement ancrés.
Le fameux crêpage de chignon
"Souvent femme varie, qu’est-ce que vous voulez que je vous dise. Oui, je parle comme Noël Le Graët, avec des clichés sexistes qui ont la peau dure. Le président de la Fédération française de football est en campagne, candidat à sa propre succession. Et il s’est exprimé hier sur tout un tas de sujets autour du football français. Et quand il a été interrogé sur l’équipe de France féminine et les relations compliquées entre la sélectionneuse Corinne Diacre et certaines joueuses, il s’est laissé aller à une sortie de route mal contrôlée.
'Aucun match perdu, voilà ce que je retiens. Donc elles peuvent se tirer les cheveux, ça m’est égal.' Ah, le fameux crêpage de chignon… Forcément, on ne peut pas parler de désaccords dans l’équipe ni de management contesté, non. Les femmes, ça se tire les cheveux, c’est comme ça. En 2021, doit-on sérieusement encore entendre ce genre de cliché éculé dans la bouche d’un président candidat ?
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Je ne parle pas du fond de la phrase. Il aurait pu dire : 'Il peut y avoir des tensions dans l’équipe, tant qu’elles gagnent, ça me va.' On est d’accord que ça veut dire la même chose ? Est-ce que ça ne suffisait pas pour se faire comprendre, monsieur Le Graët ? Vous ne pouvez pas à la fois parler de l’importance du football au féminin et balancer ce genre d’inepties blagueuses l’air de rien. Ça donne juste l’impression que le vernis craque. Oui, j’aime bien aussi parler de mon vernis à ongles.
Des petites phrases qui en disent long
Et que répondre à ceux qui objecteraient qu'une petite phrase ne remet pas en cause tout un engagement en faveur du football féminin ? Que le diable se cache dans les détails, en plus de s’habiller en Prada. Oups, pardon, j’ai failli parler chiffon. Il y a des petites phrases qui peuvent paraître innocentes comme ça, qui s’échappent au détour d’une conversation, lancées sur le ton de la blague potache qui ne fait de mal à personne. Mais en fait elles en disent plus long sur le climat général que les idées courtes qu’elles véhiculent.
Ça rappelle la sortie de l’ex-président du comité d’organisation des Jeux de Tokyo sur les réunions avec les femmes, qui prennent trop de temps parce qu’elles discutent beaucoup. En fait on n’en peut plus de ces clichés qui rabaissent systématiquement les femmes dans le sport. Et on ne peut pas demander un comportement exemplaire aux supporters, par exemple, si les dirigeants eux-mêmes se laissent aller à ces facilités d’un autre temps.
Le monde bouge, on vous le raconte tous les jours sur Europe1, mais parfois il bouge trop lentement. Alors s’il vous plaît, dans cette campagne électorale à couteaux tirés, évitez les casseroles sexistes. Et voilà, je retombe dans le lexique de cuisine."