Qui admire-t-on lorsqu'on est l'une des trois seules personnes sur Terre à être champion du monde de football à la fois comme joueur et sélectionneur ? Qui regarde-t-on avec des yeux de Chimène quand on dirige depuis près de dix ans la sélection nationale de son pays, avec le sacre suprême sur un CV déjà bien garni ? C'est la question qu'a posée Michel Denisot à Didier Deschamps, samedi, dans l'émission Icônes, sur Europe 1. Le sélectionneur des Bleus a d'ailleurs refusé d'employer ce terme, lui préférant celui de "références".
L'école Denoueix
Dans la carrière de Didier Deschamps, il y a, avant un homme, une "école" : celle du FC Nantes, que le Bayonnais a rejoint à l'adolescence pour y faire ses gammes. En Loire-Atlantique, le milieu de terrain a découvert un projet de jeu unique, porté par des figures emblématiques. "J'ai d'abord eu Raynald Denoueix, le directeur du centre de formation, qui a été très important puisque j'étais surtout au contact de lui, avec l'environnement du centre de formation. Coco Suaudeau (Jean-Claude Suaudeau, ndlr) s'occupait des pros, donc c'est plus Raynald Denoueix et les différents professeurs" du FC Nantes qui ont eu cette influence sur le Basque.
Face-à-face avec Tapie
Formé, installé, à l'aise dans son jeu, Didier Deschamps poursuit sa carrière à l'Olympique de Marseille, dirigé par Bernard Tapie au début des années 1990. "Il y a toujours des choses qui me sont restées de Bernard Tapie, en bien et parfois en mal. Mais il m'a dit certaines choses qui sont importantes et qui m'ont servi dans ma carrière aussi. On a eu beaucoup d'échanges", assure aujourd'hui "DD".
Ce dernier aurait d'ailleurs pu être échangé avec Jocelyn Angloma, qui jouait alors au Paris Saint-Germain. "Je lui ai tenu tête (à Bernard Tapie). J'ai fait en sorte de ne pas fléchir", se rappelle aujourd'hui Didier Deschamps. "Ça aurait pu mal se passer, mais malgré tout, il ne m'en a pas tenu rigueur. Et la saison qui a suivi, j'ai eu l'opportunité et il m'a donné ma chance."
Une proximité avec Agnelli à la Juve
Vainqueur de la Ligue des champions avec l'Olympique de Marseille en 1993, le milieu de terrain récidive avec la Juventus Turin en 1996. Dans le Piémont, c'est avec une autre figure qu'il se lie, "l'Avvocato Agnelli" (Gianni de son prénom, propriétaire de la Juventus ndlr). "C'était quand même son club. Il y avait un pouvoir de décision à trois têtes avec Antonio Giraudo, Roberto Bettega, l'ancien joueur, et Luciano Moggi. C'est eux qui dirigeaient le club. Mais l'Avvocato… Il venait parfois à l'entraînement et il parlait français. Je lui ai juste dit, au départ, 'je suis désolé, mais je ne suis pas Michel Platini, je ne pourrai jamais faire comme lui'. Il l'avait bien compris et il avait en plus beaucoup d'humour, même si parfois, il pouvait faire des sorties médiatiques lourdes, par moments."
Jacquet, "une grande référence"
Il y a enfin Aimé Jacquet, sélectionneur des Bleus champions du monde en 1998 avec Didier Deschamps comme chef d'orchestre dans le cœur du jeu. Si le Basque refuse là encore de parler d'icône, l'homme du Forez est pour lui "une grande référence, au moins, pour ne pas dire plus". C'est ainsi qu'il éprouve "une éternelle reconnaissance pour ce qu'il a fait de nous et la relation qu'on a pu avoir et que j'ai toujours, d'ailleurs. Je considère cette relation comme étant privilégiée, encore aujourd'hui, car je peux échanger avec lui." Et partager l'expérience, rarissime, d'avoir mené une sélection sur le toit du monde.