Au micro de Jacques Vendroux, Yannick Noah revient, dans un podcast inédit, sur son sacre à Roland-Garros en 1983. 40 ans plus tard, le dernier Français victorieux sur la terre battue parisienne livre les coulisses de cet exploit. Une performance née notamment d'une haine farouche de la défaite forgée un an plus tôt... Europe 1, radio officielle de Roland-Garros.
"J'ai grandi dans une culture où arriver en demi-finale, c'est déjà pas mal". La célèbre maxime reprise par Pierre de Coubertin , assurant que "l'important, c'est de participer", n'a jamais trouvé grâce aux yeux de Yannick Noah . Sur le court de tennis, rien ne compte plus que la victoire pour celui qui prépare un an à l'avance son triomphe à Roland-Garros . Avant de faire chavirer le public de la porte d'Auteuil, le Franco-camerounais participe, en 1982, à la campagne de Coupe Davis qui mène l'équipe de France jusqu'en finale, perdue face aux États-Unis . Mais au cours de cette épopée, c'est un autre évènement totalement étranger au tennis qui fait germer en lui cette "haine" de la défaite.
Direction le Stade Ramon Sanchez-Pizjuan de Séville où, à la veille du quart de finale de Coupe Davis face à la Tchécoslovaquie, l'équipe de France de football défie l'Allemagne, ou plutôt la RFA, en demi-finale du Mondial de football 1982. Une soirée cruelle pour les Bleus emmenés par Michel Platini , battus aux tirs au but après un match d'anthologie (3-3). Une rencontre également marquée par la sortie kamikaze du gardien Harald Schumacher sur le pauvre Patrick Battiston , évacué sur civière, inconscient, le corps soulevé de spasmes. "On perd un match imperdable", se souvient Yannick Noah. "On mène 3-1, on est plus forts qu'eux ! Et au lendemain de la défaite, L'Équipe, qui est à l'époque la Bible, titre 'Formidable' ou 'extraordinaire', quelque chose comme ça". Un état d'esprit qui ne sied guère au natif de Sedan.
Briser la malédiction
"Et moi, je me suis dit : 'non... Je ne suis pas formidable si je perds en demie. Et je vais lutter contre ces gens-là", lance Noah au micro de Jacques Vendroux. Le Tricolore met alors le cap sur son objectif numéro 1. Celui qu'aucun de ses compatriotes n'a réussi à atteindre jusque-là dans l'ère open : soulever le trophée à Roland-Garros. Un tournoi qu'il avait quitté en quart de finale en 1982, battu par l'Argentin Guillermo Vilas. "En 1983, je pensais que je pouvais gagner. Je pensais que c'était possible et que je faisais partie des deux-trois qui pouvaient gagner. En 1982, je faisais partie des dix", développe-t-il.
>> LIRE AUSSI - INEDIT - Yannick Noah raconte ses tout premiers coups de raquette dans sa chambre à Yaoundé
Ce chemin vers le succès, Yannick Noah le tracera aux côtés de son entraîneur, Patrice Hagelauer. Une "osmose" se crée entre les deux hommes. "On s'est dit 'on essaie un truc, mais c'est pour aller chercher le Graal'". Mais ce désir de triomphe personnel prend aussi une dimension collective. Le duo veut briser la malédiction. Celle qui enferme la France dans un statut d'éternelle vaincue. "Le truc, c'est qu'à chaque fois qu'on va voir les matches, on paume ! On ne gagne jamais ! On n'a pas ce truc. On n'a pas, dans la salle des trophées, dans les salles d'entraînements ou dans les vestiaires, de photos d'un des nôtres qui a le trophée de Roland. Et nous, on s'est dit 'on va le faire nous'".
Un rêve attisé par la joie que procurerait un tel évènement. "Tu te dis 'mais p**** si on gagne mais ça va être le feu ! Mais ils vont tous mourir de joie ! Et on peut faire ça", se souvient-il. Yannick Noah avait donc déjà tout vu. Un an plus tard, sur un court central totalement acquis à sa cause, le Français vient à bout du Suédois et tenant du titre Mats Wilander en trois sets. Un exploit qu'aucun autre tricolore n'est parvenu, pour l'heure, à reproduire.
Pour écouter en intégralité le récit intime et rare de Yannick Noah sur les moments les plus forts de sa vie, retrouvez le podcast "Yannick Noah, entre vous et moi" produit par Europe 1 Studio sur votre plateforme d’écoute préférée .