Le petit poucet s’invite en finale. La Juventus Turin, qualifiée de plus faible équipe du dernier carré de la Ligue des champions, a réalisé l’immense exploit d’éliminer le Real Madrid mercredi soir. Les Merengue, tenants du titre, ont subi la loi des quadruples champions d’Italie (2-1 à l’aller, 1-1 au retour). La Vieille Dame, qui affrontera le FC Barcelone en finale le 6 juin prochain à Berlin, signe avec fracas son grand retour parmi le gotha du foot européen. Douze ans après sa dernière finale, perdue en 2003 contre l’AC Milan (0-0, 2 t.a.b. à 3), la Juve tentera de décrocher une troisième coupe aux grandes oreilles.
Les tirs au but en finale de Ligue des champions 2003, perdus par la Juve contre l'AC Milan (0-0, 2 t.a.b. à 3) :
La Juve, poids lourd du foot européen. Patiemment, méthodiquement, le club italien a retrouvé sa place de géant d’Europe. Depuis 2003, la Juve n’était pourtant plus apparue dans le dernier carré de la Ligue des champions. Un déclin qui contrastait avec un palmarès de titans. Visez plutôt : deux Ligue des champions (1985 et 1996), une coupe des Coupes (1984) et trois coupes de l’UEFA, l’ancêtre de la Ligue Europa (1977, 1990, 1993), et des joueurs de légende par wagons (Platini, Baggio, Zidane, Nedved, tous les quatre Ballons d’Or avec le maillot turinois). Au début des années 2000, la Vieille Dame terrorisait encore les jeunes impétueux qui osaient la défier. Mais un scandale de corruption faillit lui porter un coup fatal.
La descente aux enfers en 2006. Quelques semaines avant le début du Mondial 2006, l’institution piémontaise est secouée de toutes parts. La raison : un scandale de corruption d’arbitres, baptisé "Calciopoli", dans lequel les plus hauts dirigeants turinois sont impliqués. Quelques jours après le sacre de l’Italie à la Coupe du Monde, la Vieille Dame est rétrogradée en deuxième division et déchue de ses titres de champion acquis en 2005 et en 2006. De fait, la Juve est également disqualifiée de la Ligue des champions, dont elle venait d’atteindre les quarts de finale, battue par Arsenal.
La reconquête de l’Italie. Durant une décennie, les Turinois ont connu une longue traversée du désert au niveau européen. Le club, facilement remonté en Serie A dès 2007 sous l’impulsion de Didier Deschamps au poste d’entraîneur, a d’abord dû retrouver sa place au sommet du foot italien avant de rêver à des succès continentaux. La Juve a cependant attendu 2012 pour regoûter à l’ivresse d’un titre de champion d’Italie, après des années passées dans l’ombre des géants milanais, l’Inter et l’AC Milan. Depuis, les Bianconeri n’ont plus quitté leur trône. Cette saison, ils ont même décroché leur quatrième titre de champion d’affilée, après avoir dominés sans partage la Serie A.
La difficile ascension du mont Europe. Si la Juve a retrouvé sa place de roi d’Italie, l’Europe s’est longtemps refusée à elle. En 2013, le Bayern Munich avait facilement écarté les Turinois en quarts de finale de Ligue des champions (2-0, 2-0). Regonflés à bloc la saison dernière, les Bianconeri étaient pourtant tombés de très, très haut. Éliminée sans gloire dès la phase de poules, la Juve avait alors été reverser en Ligue Europa. Lot de consolation : la finale de la compétition avait lieu au Juventus Stadium, l’enceinte du club italien. Mais, en demi-finale, le Benfica Lisbonne enterra les espoirs turinois d’être sacrés à domicile (2-1, 0-0).
Buffon, douze ans après. Forcément, les déceptions s’accumulant dans son dossier, le prévenu Juventus ne faisait pas figure de favori pour la victoire en Ligue des champions, cette saison. Mais portés par un effectif mélangeant joueurs expérimentés (Buffon, Chiellini, Pirlo, Tevez) et jeunes pépites (Morata, Pogba), les Bianconeri ont déjoué tous les pronostics pour rejoindre la finale. Douze ans après, un homme aura l’occasion de prendre sa revanche sur l’histoire. Gianluigi Buffon, le gardien et capitaine du club italien, était déjà présent dans les cages en 2003. A 37 ans, le portier champion du monde avec la Squadra Azzura en 2006 pourrait achever sa carrière en apothéose. A condition de multiplier les parades contre l’infernal trio du Barça, Messi-Suarez-Neymar, le 6 juin prochain à Berlin.