"C'est toujours compliqué avec l'équipe de France." Hugo Lloris a beau manier l'ironie en conférence de presse, le gardien a parfaitement résumé l'état d'esprit général après la qualification des Bleus pour le Mondial 2018. La difficile victoire de l'équipe de France face à la Biélorussie (2-1), mardi soir au Stade de France, a été à l'image de ces éliminatoires : crispante, sans envolées offensives et sans maîtrise digne d'un prétendant à la couronne mondiale. A huit mois du début de la Coupe du monde, le chantier s'annonce colossal pour Didier Deschamps et ses troupes, si séduisantes sur le papier.
Des éliminatoires très mitigés. Alors oui, peu importait le résultat mardi soir, seule la qualification comptait. La Suède, deuxième du groupe A, a grandement facilité la tâche des Bleus en perdant aux Pays-Bas (2-0). Même une défaite aurait qualifié directement les Bleus, mais il n'empêche : dans le jeu, on est en droit d'attendre nettement mieux. "Je retiens que l'objectif est atteint mais que nous n'avons pas non plus une maîtrise suffisante dans la durée. Je ne suis pas borgne ou aveugle", a lucidement analysé Didier Deschamps, le sélectionneur des Bleus, interrogé en conférence de presse.
La difficile victoire contre la Biélorussie, bon dernier de la poule, n'est pas un cas isolé. Les trois dernières rencontres de cette campagne éliminatoire ont été laborieuses, voire médiocres par séquences. Le nul insensé contre le Luxembourg (0-0), malgré des tonnes d'occasions, avait déjà alerté sur les limites de cette équipe de France. Le succès étriqué en Bulgarie (1-0), samedi dernier, a confirmé les lacunes dans le jeu. Au centre des interrogations : le secteur offensif, annoncé comme le point fort de cette équipe, mais auteur de seulement trois buts lors des trois rencontres contre les adversaires les plus faibles de ce groupe A.
Du potentiel offensif sur le papier, pas sur le terrain. Avec 18 buts inscrits lors de ces éliminatoires (en 10 matches), la France est loin des meilleures attaques de cette campagne de qualification, comme la Belgique, l'Allemagne (43 buts chacun!), l'Espagne (36 buts), ou encore le Portugal (32 buts). L'émergence d'une jeune génération d'attaquants pleine de promesses, de Kylian Mbappé à Kingsley Coman, en passant par Thomas Lemar, devrait pourtant prémunir les Bleus contre ces problèmes offensifs. Sauf que, malgré leur précocité, ces jeunes alternent le bon et le moins bon et ne répondent pas encore aux énormes attentes placées en eux.
"On attend beaucoup. Il y a une vague de jeunes qui est arrivée, il faut qu'on apprenne à se connaître", a avancé "l'ancien" Dimitri Payet pour expliquer ce manque d'alchimie offensive. Mardi soir, le salut est venu non pas des jeunes, mais des habituels titulaires Antoine Griezmann, indiscutable leader de l'attaque tricolore, et Olivier Giroud, toujours discuté mais toujours aussi précieux. La preuve qu'en équipe de France, le talent ne suffit pas.
Deschamps ne trouve pas la solution. Le secteur offensif ne peut pourtant pas être jugé seul responsable de tous les maux des Bleus. Depuis l'Euro 2016, les critiques sur le fond de jeu, ou plutôt son absence, sont récurrentes. Didier Deschamps, en poste depuis 2012, n'a toujours pas trouvé la solution et semble même à court d'idées. "J'ai bien conscience qu'on doit mieux maîtriser certaines situations", a concédé le sélectionneur, sans s'attarder outre mesure sur son projet de jeu.
Car le problème est bien là : avec "DD", biberonné au foot italien, seule la victoire est belle. Une vision à contre-courant des canons actuels, symbolisés par l'Espagne et l'Allemagne, deux équipes au potentiel offensif comparable mais pourtant infiniment meilleures dans leur expression collective. L'équipe de France a huit mois pour combler le fossé, béant, qui la sépare de ces deux nations majeures du jeu. Mais comment y parvenir en si peu de temps, alors que la solution n'a pas été trouvée depuis la prise de fonction de Didier Deschamps ? Seul le sélectionneur a la réponse.