Les Français avaient pris l'habitude de s'émerveiller devant ce corps d'1,50 mètre, toujours actif, toujours fringant, malgré le poids sans cesse plus lourd des années. Il faudra désormais se résoudre à ne plus voir Robert Marchand faire tomber les records de l'heure à vélo, à intervalles réguliers. Le cycliste français est mort à 109 ans, comme l'a annoncé samedi la municipalité de Mitry-Mory, en Seine-et-Marne, où il résidait en Ehpad. La fin d'un parcours exceptionnel, façonné par les défis et jalonné par les exploits, comme celui du record de l'heure des plus de 105 ans, battu le 4 janvier 2017.
"Vie d'ascète"
"J'ai mal au bras, parce que j'ai des rhumatismes", confiait-il après sa performance au micro d'Europe 1. "Je ressens un peu d'émotion de voir tout ça, ce n'est même pas croyable. Voir toute cette foule… C'est à se demander si c'est vrai." L'homme au rire contagieux se félicitait alors d'avoir "déjà réussi à vivre jusqu'à 105 ans". "On met neuf mois pour arriver au monde et puis on met trente secondes pour claquer", plaisantait-il dans un éclat de rire.
Comment Robert Marchand est-il parvenu à faire tomber les records, à un âge où faire de l'exercice devient de plus en plus compliqué ? À l'occasion du fameux record des plus de 105 ans, son médecin, Gilles Dhonneur, racontait les secrets d'une préparation aux petits oignons. "Il fait 10 à 15 km de vélo tous les jours. Quand il fait mauvais, pour ne pas prendre froid, il fait ça sur un vélo d'appartement. Sinon, il fait ça en extérieur. Il a une corpulence faible et une masse musculaire relativement importante. Il a surtout un très bon cœur. Et comme il a une vie d'ascète, c'est un homme en très bonne santé. Il est capable de faire des performances incroyables."
Avait-il d'autres secrets ? "Robert, il est devant. Il nous sème dans les montées parce qu'il a un pédalage bien régulier. Il grimpe et nous on a du mal à le suivre. Il doit avoir un secret, sûrement, mais il dit simplement qu'il boit de l'eau et avec du miel", racontait en 2011 Rolande, une femme de 70 ans du même club cycliste que lui.
Des efforts "quasiment violents"
Un cocktail miracle qui lui avait réussi. "On l'a testé hier avec des efforts très importants, quasiment violents", poursuivait le docteur. "Il a passé toutes les barrières qu'on lui a imposées hier et on était quasiment sûr que cet effort aujourd'hui, qui est plutôt de l'endurance, ça allait bien se passer." À l'époque, le cycliste amateur avait parcouru 22,547 km en une heure au vélodrome national de Saint-Quentin-en-Yvelines. Un exploit fêté simplement, "sans gros écart", comme l'expliquait Gilles Dhonneur.
La tenue jaune et violette avait été définitivement remisée un an plus tard, en janvier 2018. Mais l'ancien pompier de Paris, qui fut également bûcheron au Canada, avait conservé sa bonne humeur, même privé de ses sorties à vélo sur les routes de Seine-et-Marne. Celles-ci sont désormais orphelines d'un personnage qui aura, à sa manière, marqué le sport français.