Tennis-Masters 1000 de Paris : Karen Khachanov, la révélation russe

Karen Khachanov a remporté dimanche son troisième tournoi de l'année après les ATP 250 de Marseille et de Moscou. © Anne-Christine POUJOULAT / AFP
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avec Christophe Lamarre , modifié à

Vainqueur de Novak Djokovic, dimanche, en finale, à Paris, le jeune Russe, 22 ans, est sans doute l'un des futurs grands du tennis mondial.

Dis-moi qui tu bats, je te dirai quel joueur tu es… John Isner, Alexander Zverev, Dominic Thiem et enfin Novak Djokovic : en quatre jours, entre les huitièmes et la finale, le jeune Russe Karen Khachanov, 22 ans, a battu quatre membres du Top 10 pour s'adjuger dimanche le Rolex Paris Masters, le premier Masters 1000 (deuxième catégorie de tournois du circuit derrière les Grand Chelem) de sa carrière.

"Je ne pleure peut-être pas mais je suis très heureux", a-t-il confié après son succès en deux sets contre Djokovic, dimanche, à l'AccorHotels Arena. "Je suis vraiment satisfait de la façon dont j'ai joué ici cette semaine. Match après match, j'ai haussé mon niveau de jeu contre tous ces gars du Top 10 et Novak, le n°1 (n°2, il était assuré de récupérer la place de n°1 mondial à l'issue du tournoi, ndlr), aujourd'hui (dimanche). "Après des défaites difficiles contre des top joueurs comme Rafa (Nadal) à New York (au 3ème tour de l'US Open), cela m'a poussé à mes limites et à travailler encore plus dur."

Il avait résisté à Nadal à l'US Open. Car si Khachanov est devenu dimanche le onzième joueur à remporter son premier Masters 1000 à Paris, sa victoire finale n'est pas une si grande surprise, compte tenu de la qualité de son tennis dans les grands rendez-vous. Comme il le rappelle, le Russe avait tenu tête à Rafael Nadal à l'US Open, s'inclinant en quatre sets après 4h23' d'un duel acharné (5-7, 7-5, 7-6[7], 7-6[3]). Quelques semaines plus tôt, il avait déjà atteint les demi-finales du Masters 1000 de Toronto, ne s'inclinant que face à… Nadal. Cette fois, ce solide gaillard de près de deux mètres (1,98m) et 87 kg, est allé au bout, mettant fin à la série de 22 victoires de Djokovic avec un tennis de feu.

Entendu sur europe1 :
Il est jeune, grand, puissant et capable de tenir la pression

"Il est jeune, il est grand, il est puissant. On l'a vu, mentalement, il est très bien construit, il est capable de tenir la pression dans les moments importants, même quand il est dos au mur. Ce sont des choses qui ne trompent pas", a relevé au micro d'Europe 1 le directeur du tournoi, Guy Forget. Impressionnant sur le court, avec des coups de canon en coup droit comme en revers, Khachanov l'est également dans les moments chauds, comme il l'a prouvé en huitièmes de finale en tenant tête à un autre géant, John Isner, en trois sets et près de 2h30 de jeu (6-4, 6-7[9], 7-6[8]). Preuve également de son caractère, il a remporté les quatre finales qu'il a disputées sur le circuit ATP : Chengdu en 2016, Marseille, Moscou et Paris cette année.

Le "nouveau Marat Safin". Évidemment, Khachanov vainqueur à Paris, cela ne fait que renforcer le parallèle avec l'un de ses illustres aînés, Marat Safin, qui s'était imposé trois fois dans le dernier Masters 1000 de l'année (2000, 2002 et 2004).

"Ça (la ressemblance entre les deux joueurs) m'a sauté aux yeux la première fois que je l'ai vu jouer, il y a deux ans, à Roland-Garros", explique dans L'Équipe Arnaud Di Pasquale, contemporain de Safin sur les courts et ancien directeur technique national du tennis français. "Je m'étais arrêté pour le regarder jouer. Déjà, comme Safin, il a passé du temps en Espagne (Khachanov a été entraîné pendant quatre ans, entre 2013 et 2017, par l'ancien joueur espagnol Galo Blanco, ndlr). En poussant le bouchon, je dirais que c'est sa copie conforme. En tout cas, je trouve qu'il y a plein de similitudes. Au-delà de son passage en Espagne, il y a sa taille, son gabarit, sa frappe de balle, son service, son revers… Pour un mec de 1,98 m, je trouve qu'il se déplace super bien. C'est assez bluffant, il bouge comme un mec de 1,80 m. En fait, on en oublie presque sa taille." Guy Forget relève un autre point commun avec Safin, né comme Khachanov à Moscou. "Il y a des similitudes dans le jeu, niveau coup droit, niveau revers, mais aussi au niveau de la personnalité", insiste-t-il. "C'est un joueur très attachant, très généreux, très chaleureux, qui est apprécié de la plupart des joueurs dans le vestiaire."

Un oncle mécène. Après Galo Blanco, dont il s'est séparé il y a pile un an, Khachanov travaille désormais avec Vedran Martic, l'ancien coach du Croate Goran Ivanisevic. Et bénéficie toujours d'un important soutien familial, comme c'est souvent le cas dans le tennis. Ici, c'est son oncle Alexander Zayonts, membre du comité directeur d'une compagnie de grande distribution en Russie et dirigeant d'une entreprise de construction et de décoration intérieure, comme l'explique L'Équipe, qui lui a mis le pied à l'étrier quand il avait quinze ans en finançant le début de sa carrière. Et qui en récolte aujourd'hui les premiers fruits.

Khachanov est 11ème au classement ATP publié lundi. En attendant peut-être mieux ? "Je trouve qu'il a encore des aspects dans son jeu qui sont perfectibles, notamment son jeu à la volée, son déplacement, des petites choses techniques qu'il peut faire un petit mieux, donc s'il continue de travailler, imaginez quel peut être son potentiel d'ici un, deux ou trois ans", souligne Guy Forget. Comme tous les membres de la nouvelle génération, la fameuse "next gen" (Alexander Zverev, Denis Shapovalov, Stefanos Tstsipas…), il va désormais falloir à Khachanov tenir sur la durée. Car ce Rolex Paris Masters 2018 a également montré que les trentenaires, Novak Djokovic, 31 ans, ou Roger Federer, 37 ans, avaient encore de sacrés restes…