Si la disette du cyclisme français sur le Tour de France dure depuis 32 ans et le succès du "Blaireau" Bernard Hinault, celle sur le Tour d'Italie est à peine moins longue. En effet, il faut remonter à 1989 pour trouver trace d'un vainqueur français, avec l'inoubliable Laurent Fignon. Cette année, pour la 100ème édition de l'épreuve, la France présente un atout majeur en la personne de Thibaut Pinot. Le leader de la FDJ peut-il le faire ? Troisième du Tour de France 2014, il a en tout cas fait du Giro l'un des objectifs principaux de sa saison. Et ne cache pas ses ambitions, alors que le peloton s'élance vendredi de Sardaigne pour un peu plus de trois semaines de course.
"J'ai tout fait pour être très bien". "Quand on se présente au départ, c'est pour gagner", avoue le Franc-Comtois. "Mais l'important, c'est de faire le mieux possible. Pour le classement, on verra... J'ai tout fait pour être très bien. Je suis prêt à me battre pendant trois semaines. Gagner un grand tour, c'est très dur. La victoire, ça paraît compliqué. Le maillot rose ? J'espère le porter un jour." Ce maillot rose semble pourtant promis à Nairo Quintana. Le Colombien, vainqueur de l'épreuve en 2014, trouvera sur cette 100ème édition un terrain de jeu à sa mesure, avec plusieurs (dures) étapes de montagne.
"Le plus fort, tout le monde le sait, c'est Quintana. Il a déjà gagné (2014), et c'est le meilleur grimpeur du peloton. Derrière, on est presqu'une bonne dizaine à être au même niveau." L'Italien Vincenzo Nibali (Bahrain-Merida), tenant du titre, les Britannique Geraint Thomas (Sky) et Adam Yates (Orica-Scott) ou encore le Néerlandais Steven Kruijswijck (Lotto-Jumbo) sont aussi des candidats crédibles à la victoire finale, le 28 mai prochain, à Milan.
Mais Pinot, qui aura moins la pression que sur les routes du Tour, ne dit craindre personne, mis à part… lui-même. "Le premier risque, c'est moi", estime-t-il. "Il me faudra être en forme, ne pas tomber, ne pas avoir de souci de santé. Les adversaires, je les connais, je me bats avec eux depuis des années. La météo n'est pas un problème sauf s'il fait 50 degrés. Le parcours, c'est à l'italienne... Chaque jour, il peut y avoir un danger." Pinot va découvrir cette année les routes du Giro, qu'il dispute pour la première fois, face à des rivaux bien plus rôdés que lui à une course parfois folle. Mais là encore, le leader de la FDJ, se montre confiant. "Je vais découvrir", précise-t-il. "J'ai déjà couru en Italie mais ce n'était pas sur les routes de ce Giro. Je n'ai pas fait de reconnaissance, on a privilégié l'entraînement. Je verrai jour après jour. Le staff a fait ce qu'il faut. Ce n'est pas ce qui me fait peur."
Un impératif : réussir la première semaine. Le début de saison de Pinot, marqué par une victoire sur une étape du Tour d'Andalousie (devant Alberto Contador et Alejandro Valverde quand même !) et une autre au Tour des Alpes, où il a joué les premiers rôles aux côtés de Geraint Thomas et du regretté Michele Scarponi, a été plutôt réussi. Dans la fraîcheur du printemps italien (des températures qui lui conviennent mieux que la forte chaleur), Pinot pourra compter sur ses lieutenants suisses en montagne, Steve Morabito et Sébastien Reichebach, et sur de sacrés tauliers le reste du temps (Bonnet, Ladagnous, Roy, Vaugrenard…). Ce Giro n°100, très montagneux, propose également près de 70 kilomètres de contre-la-montre individuel, une discipline dans laquelle Pinot a énormément progressé et dont il est champion de France en titre.
9️⃣ coureurs
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Mais pour espérer jouer les premiers rôles au général, il faudra être dans le coup d'entrée. Car, après les trois premiers jours en Sardaigne, les coureurs seront dans le vif du sujet dès la quatrième étape, avec l'arrivée prévue sur les pentes de l'Etna.
"Avec l'Etna dès la 4ème étape, ça part fort, surtout au lendemain d'un jour de repos. J'aurais préféré qu'il vienne un peu plus tard", reconnaît le coureur français. "J'ai souvent un peu de mal à me mettre dans la course, il me faut 4-5 jours." On l'avait remarqué lors des deux derniers Tours de France, où Pinot avait été rapidement distancé lors de la première semaine, après des incidents mécaniques ou de gros coups de mou. Seizième du général en 2015, il avait même dû abandonner à mi-parcours l'an dernier après une bronchite.
Dans ces conditions, et alors que Pinot reste un jeune coureur de grands Tours (7 participations au total, avec trois abandons), il est clair qu'une victoire finale serait un exploit et un podium, déjà une sacrée performance. Le cyclisme français, qui n'en a connu que deux depuis 1989 (Charly Mottet en 1990 et John Gadret en 2011) s'en contenterait aisément.