Une première. Au nom du droit à l'oubli, la justice française a enjoint Google, pour la première fois, à déréférencer un article datant de 2006. Il y relatait l'arrestation d'une internaute condamnée à trois ans de prison dont trois mois ferme, pour escroquerie. Inquiet des conséquences sur sa recherche d'emploi, elle avait demandé au moteur de recherche le retrait de cet article, ce que le géant américain avait refusé. Mais le tribunal de grande instance de Paris lui a finalement donné raison le 19 décembre 2014.
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Pourquoi Google a dû se plier à la Justice. En 2006, cette internaute était condamné à trois ans de prison dont trois mois ferme pour escroquerie, comme le relate un article du Parisien affiché dans les résultats de Google. En 2014, alors que l'article apparaît toujours lorsque l'internaute concernée tapait son nom sur Google.fr, il décide d'envoyer une demande de déférencement au nom du droit à l'oubli. Mais le géant américain refusait en septembre dernier, poussant l'internaute à se tourner vers la justice. Cette dernière a donc exigé, le 19 décembre 2014, que Google retire sous dix jours les liens en question de ses résultats de recherche. Le tribunal de grande instance de Paris a retenu le fait que huit années s'étaient écoulées depuis la publication de l'article mais aussi que la condamnation de l'internaute n'apparaissait pas dans son casier judiciaire et donc que ce type d'information n'aurait pas dû être accessible à un employeur potentiel.
Vers une jurisprudence ? En mai dernier, la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) publiait un arrêt autorisant les internautes du Vieux Continent à exiger un droit à l'oubli en ligne. Google doit ainsi, depuis cette date, récolter les requêtes de utilisateurs de son moteur de recherche exigeant le retrait d'une ou plusieurs informations les concernant, si celles-ci étaient jugées "non pertinentes, obsolètes ou inappropriées". Des suppressions qui ne s'appliquent cependant qu'aux résultats affichés après une recherche effectuée pour le nom d'un internaute.
Il y avait bien eu une première condamnation en septembre 2014 mais il ne s'agissait pas encore de droit à l'oubli : "Une décision de septembre 2014 a été présentée, à tort, comme étant la première condamnation pour droit à l'oubli en France", a expliqué Romain Darrière, avocat de la plaignante en question, au Figaro. Une "mauvaise interprétation" d'après l'avocat, puisqu'il s'agissait de propos diffamatoires et non de droit à l'oubli. La condamnation du 19 décembre pourrait donc "faire jurisprudence", estime Romain Darrière.
Autre condamnation du même ordre : en février 2012, une femme figurant dans des vidéos pornographiques sous pseudonyme, avait vu son véritable nom révélé dans les résultats de recherche de Google, qui avait dû supprimer les requêtes en question. Pour Gérard Haas, avocat spécialisé en droit du numérique interrogé par Europe 1, c'est "la première décision" concernant le droit à l'oubli en France. Condamné, Google avait refusé dans un premier temps et devant les astreintes imposées par le tribunal de grande instance de Paris (1.000 euros par jour de retard), avait fini par céder.
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La France en tête des requêtes pour le droit à l'oubli. Depuis le mois de mai dernier et la mise en place de ce droit au déréférencement en ligne, la France figure en tête des pays les plus demandeurs de droit à l'oubli. Il y a en effet eu 50.000 demandes déposées auprès de Google émanant d'internautes français. Le géant américain a cependant refusé plus de la moitié d'entre elles (52%).