C'est vraisemblablement une première dans l'histoire du cinéma américain : en raison de menaces à répétition émanant d'un groupe de hackers nord-coréens, le studio Sony Pictures a annoncé mercredi que son film L'Interview qui tue ne sortirait pas en salles. Dans cette comédie, les deux héros doivent interviewer puis assassiner le leader de la Corée du Nord Kim Jong-Un. Mais l'annulation de ce long-métrage est critiquée par de nombreuses personnalités qui craignent que l'incident ne crée un précédent.
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>> Oui, la menace était trop importante. Dans un premier temps, le piratage d'envergure subi par Sony n'a concerné que des informations du studio de cinéma. Mais rapidement, il s'est avéré que des données sur le personnel de Sony Pictures (adresses, numéros de téléphone, numéro de sécurité sociale, etc.) avaient également été récupérées. Des données que les hackers menaçaient de révéler au grand public, si le studio ne retirait pas son film des salles noires.
Le géant nippon n'avait pas cédé, jusque mercredi, lorsque les pirates menacèrent de s'en prendre au public qui assistera aux projections du film sur le continent américain. "Rappelez-vous du 11 septembre 2001", préviennent les hackers. Sony a alors pris la décision de ne pas diffuser "The Interview". "Au regard de la décision prise par une majorité de cinémas de ne pas présenter le film The Interview, nous avons décidé de ne pas le sortir en salles le 25 décembre", a déclaré Sony Pictures.
>> Non, car "les Coréens ont gagné". De nombreux médias ont immédiatement reproché à Sony cette décision. "Kim Jong Won" a titré New York Post, un jeu de mot combinant le nom du leader coréen (Kim Jong-Un) et le verbe gagner (to win en anglais). Car même si la République de Corée a affirmé ne pas être derrière ces attaques, elle a dans le même temps salué l'initiative du groupe de hackers, qui se fait paradoxalement appelé "Guardians of Peace (Guardiens de la paix). Pourtant, plusieurs médias américains affirment que le gouvernement coréen a joué un "rôle central" dans ces attaques informatiques. Les suspects seraient ainsi issus du "Bureau 121", un groupe d'experts informatiques de haute volée bénéficiant du soutien de Kim Jong Un et de ses acolytes.
Le New York Post et ses unes frappeuses, comme lors de l'affaire #DSK#19h30#Cubapic.twitter.com/uhDCdtwmOT— Darius Rochebin (@DariusRochebin) 18 Décembre 2014
Le 11-Septembre encore dans toutes les têtes. Le souvenir des attentats de 2001 est encore très présent dans l'esprit des Américains, ce qui explique en partie la décision radicale prise par Sony. Mais à en croire le département de la sécurité américaine, le spectre d'attentats perpétrés par des militants de Corée du Nord n'est "pas crédible". C'est sur ce point que s'appuient de nombreuses personnalités pour critiquer la décision de Sony : acteurs et réalisateurs ont multiplié les déclarations à l'encontre du studio hollywoodien.
Sad day for creative expression. #feareatsthesoul— Steve Carell (@SteveCarell) 17 Décembre 2014
L'acteur Steve Carell a ainsi parlé sur Twitter d'un "Triste jour pour la liberté d'expression", quand le cinéaste Damien Chazelle redoutait "une forme d'autocensure" chez les réalisateurs et scénaristes. "Aujourd'hui, les États-Unis ont succombé à une attaque sans précédent sur notre principe le plus chéri, la liberté d'expression, par un groupe de terroristes nord-coréens", a pour sa part déclaré le scénariste Aaron Sorkin (The Social Network). Pourtant, quelques heures plus tôt, le président américain en personne Barack Obama encourageait ses citoyens à défier Pyong Yang : "Ma recommandation est : allez au cinéma !" a-t-il déclaré à la chaîne ABC.
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Le casting du film s'insurge. Les acteurs du film en question ont eux-mêmes partagé leur mécontentement. C'est le cas de Rob Lowe : "Wow, tout le monde s'est couché. Les pirates ont gagné, ils remportent une victoire éclatante", a fustigé l'acteur sur Twitter.
Wow. Everyone caved. The hackers won. An utter and complete victory for them. Wow.— Rob Lowe (@RobLowe) 17 Décembre 2014
"C'est honteux que les salles de cinéma ne projettent pas L'Interview qui tue !" s'est insurgé Judd Apatow. "Est-ce qu'ils vont retirer des écrans n'importe quel film qui reçoit une menace anonyme maintenant ?" a ajouté le réalisateur de 40 ans : mode d'emploi.