"C'est officiel : les ados en ont marre de Facebook", annonce le site américain Business Insider. A la place, ils se tournent vers l'application de partage de photos Instagram ou vers l'un de ses avatars, Snapchat, qui permet de prévoir l'auto-destruction des photos mises en ligne, affirme le site. Et d'ailleurs, Facebook lui-même avoue à demi-mot son inquiétude dans son rapport annuel d'activité 2012 : "Nous sommes conscients que certains de nos utilisateurs, et en particulier les plus jeunes, ont un engagement moins fort sur notre site, et que cela profite à d'autres services et plateformes comme Instagram", ce dernier ayant d'ailleurs été racheté par Facebook en 2012. Comment expliquer ce désamour ?
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Parce que Facebook n'est plus "cool". Ce début de désintérêt est indéniablement une question de mode. "En novembre 2012, des jeunes Français nous expliquaient (…) que Facebook était devenu trop 'banal' et ancré dans leur vie réelle pour conserver son attrait", rapporte Le Monde qui s'interroge aujourd'hui sur une concurrence plus "cool". Un constat alimenté par la plaisanterie d'un ancien cadre de Facebook relayée par le site TechCrunch. Pour justifier sa décision de quitter le groupe, le jeune homme a expliqué s'être "interrogé sur la viabilité à long-terme du groupe" après un dialogue entre un journaliste du magazine américain Forbes et le meilleur ami du fils de celui-ci. "Facebook est-il encore cool ?" demande le journaliste. Le verdict du garçon est sans appel : "non, et en plus tous [mes] amis pensent la même chose". En France, les yeux des ados sont tournés vers l'application de mini-vidéos Vine, la plate-forme de blogging Tumblr mais surtout vers le réseau Twitter. "Aujourd'hui, mes amis ont tendance à supprimer leurs comptes Facebook et à se diriger vers Twitter", témoigne pour Europe1.fr Anaël, 15 ans. "On peut suivre la vie des stars en direct et surtout on peut se faire un réseau et être plus influent. C'est un peu 'la cour des grands'."
Parce que les publicités sont plus intrusives. La popularité de Facebook pâtit aussi d'évolutions propres au site : "depuis son entrée en Bourse, qui a été un échec, Facebook est sous la pression de ses actionnaires pour rendre le site plus ouvert aux marques", analyse Grégory Pouy, expert en marketing en ligne contacté par Europe1.fr, et auteur d'un post de blog intitulé "Facebook pourra-t-il se relever de son désamour ?". Pour être rentable, le géant des réseaux sociaux a choisi de gagner de l'argent avec des publicités de plus en plus intrusives dans le "newsfeed", la liste des actualités des contacts. Dernier signe de cette évolution, et non la moindre : le moteur de recherche interne, Graph Search, qui doit être lancé en 2014 et qui suscite déjà la polémique car il s'appuiera sur les milliards de données publiques des utilisateurs du site. "Facebook n'a pas le choix, c'est le modèle économique qu'il a choisi mais cela ne va pas dans le sens de la satisfaction des utilisateurs", estime Grégory Pouy. D'autres réseaux ont fait des choix différents comme le réseau social professionnel LinkedIn qui fait payer ses utilisateurs.
Conséquence : les paramètres de confidentialité, entre autres, sont très régulièrement changés vers plus d'ouverture des données. Ce qui nuit, au passage, à la lisibilité du site.
>> Voir l'évolution de la politique de confidentialité de Facebook, par Gregory Pouy :
Pour Marie, 25 ans, aller sur Facebook reste un "réflexe" mais son utilisation a changé : "j'envoie des messages, je discute en ligne, mais je n'écris plus sur le 'mur' de mes amis", confie-t-elle à Europe1.fr. "Je ne publie plus non plus de photos : j'ai beaucoup de contacts maintenant et je n'ai pas envie que tout le monde les voit. Sur Picasa par exemple, c'est plus simple de limiter l'accès à quelques personnes seulement. Et puis j'ai déjà tellement d'informations personnelles sur Facebook, je n'ai pas envie d'en rajouter"
Vers un réseau professionnel informel ? Alors est-ce le début de la fin pour Facebook ? "Je ne crois pas à la mort de Facebook dans le court terme", nuance Grégory Pouy. Son pronostic : un réseau professionnel informel, dans le prolongement de LinkedIn. "En permettant aux utilisateurs de payer pour rendre leurs statuts plus visibles, Facebook admet qu'il ne s'agit plus d'une plateforme uniquement amicale mais bel et bien d'un mix pro perso", précise-t-il. "C'est moderne et c'est une carte à jouer."