Cinq questions pour tout comprendre à l'offensive de l'Union européenne contre les GAFA

Les GAFA se retrouvent une fois de plus dans le viseur de l'Union européenne. © Damien MEYER / AFP
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, avec Isabelle Ory, à Bruxelles

L'Union européenne cherche à lutter contre l'omnipotence des GAFA avec un plan en deux axes, présenté mardi. Pour Joëlle Toledano, économiste et invitée d'Europe 1, mercredi matin, il s'agit avant tout de "reprendre le pouvoir sur ces acteurs qui ont mis en place des systèmes où ils font la loi".

L'Europe face aux mastodontes d'internet, nouveau round : la Commission européenne a présenté mardi un plan inédit pour tenter de contrer la puissance croissante des géants du numérique, communément appelés "GAFA" et au premier rang desquels on retrouve Google, Apple, Facebook ou Amazon. L'économiste Joëlle Toledano était l'invitée de Culture Médias, mercredi, pour évoquer cette nouvelle offensive de l'Union européenne. Pour l'auteure de GAFA, Reprenons le pouvoir ! (éditions Odile Jacob), il faut faire preuve de prudence à propos de l'impact de ces projets sur les mastodontes numériques.

Que contient ce projet ?

Il s'agit en réalité de deux projets de loi. Dans le premier texte, on cible les contenus qu'on trouve sur internet, les fake news, la haine en ligne, les attaques racistes, etc. Tout ce qui est interdit dans la "vraie vie" devrait l'être dans le monde numérique. Il faut que les plateformes surveillent et retirent ce qui est interdit, sinon elles risquent des amendes allant jusqu'à 6% de leur chiffre d'affaires mondial. En cas de manquements répétés, la sanction peut même aller jusqu'à l'interdiction d'opérer en Europe.

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Le deuxième axe consiste à essayer de créer un marché plus équilibré. Le texte cible spécifiquement les géants du numérique, les gatekeepers (ceux qui ont les clés de l'internet). La Commission fixe des règles en amont pour éviter les monopoles et faciliter la concurrence. Il sera par exemple interdit de piller les données, comme le fait Amazon. Il y a là aussi des sanctions prévues, des amendes et même la possibilité de démanteler des entreprises sur le marché européen.

Le pouvoir des GAFA peut-il être contré avec ces textes ?

Pour Joëlle Toledano, "c'est un outil qui va empêcher que les pratiques auxquelles on a assisté se reproduisent. C'est parfait, mais je ne suis pas absolument sûre que tout ça va nous permettre de 'revenir en arrière', c'est-à-dire que ces empires soient, si ce n'est démantelés, au moins plus ouverts, qu'eux aussi ouvrent leurs frontières et ne soient plus les maîtres de leur monde."

Le démantèlement est-il une bonne solution ?

Oui et non. Selon Joëlle Toledano, il faut faire la différence entre les entreprises visées en matière de démantèlement. Par exemple, le démantèlement de Facebook (propriétaire entre autres des services Instagram, Messenger ou WhatsApp) "peut avoir du sens sur le plan concurrentiel et pourra remettre de la dynamique" sur les marchés concernés.

Mais pour d'autres géants du numérique, comme Amazon ou Apple, "on voit très mal où il faudrait démanteler pour que ça apporte des vraies bonnes solutions" : "L'idée n'est pas de les punir, mais de redynamiser ces marchés numériques, que ces acteurs ont verrouillés. Pour autant, ils nous ont apporté des services qu'il ne s'agit certainement pas de faire disparaître."

Ces textes font-ils le jeu des géants orientaux ?

L'argument des opposants à ce texte est d'affirmer qu'en affaiblissant les géants actuels, l'Union européenne permet aux géants chinois comme Baidu, Tencent ou Alibaba de conquérir plus facilement le marché européen. "À partir du moment où on a des règles performantes pour transformer (les géants) en entreprises citoyennes normales, on fera pareil avec les autres", balaie l'économiste.

Fallait-il cibler les dirigeants des GAFA ?

C'est un instrument délaissé par Bruxelles mais choisi par Londres : le gouvernement britannique, qui a lui aussi dévoilé un arsenal législatif contre les GAFA, mercredi, veut mettre en place des sanctions pénales contre les dirigeants des géants du numérique. "C'est un bon axe d'attaque parce que sinon, on a un vrai risque que cette responsabilité se dilue", souligne Joëlle Toledano, selon qui cela pourrait "bloquer des comportements".