Les déclarations de Bruno Le Maire sur le marché des applications ne font pas l'unanimité... Plusieurs organismes, dont l'alliance européenne des développeurs, s'élèvent depuis mercredi pour dénoncer la vision biaisée du ministre de l'Economie qui a décidé d'assigner les deux géants du web pour "pratiques commerciales abusives". Google et Apple, de leur côté, assurent agir en conformité avec la loi française et se disent prêts à travailler la DGCCRF, à l'origine de l'enquête qui a conduit à leur assignation.
Des développeurs "surpris"
"On était un peu surpris par ces propos (de Bruno Le Maire, ndlr). Il n’y a pas de contrôle d’Apple ou de Google. On a des très bonnes relations avec eux et, au contraire, ils ont toujours été aidant lorsque l'on s'est lancé sur de nouveaux marchés", explique à Europe 1 Camille Rumani, créatrice de Eatwith (anciennement Vizeat), une application qui permet d'aller manger chez l'habitant. "On n’a pas l’impression qu’il y ait un rapport dissymétrique", poursuit-elle.
L'alliance européenne des développeurs a également réagi aux propos du ministre de l'Economie. "Nos recherches montrent que les développeurs ont, généralement, un rapport positif avec les plateformes et ne pensent pas qu'elles les exploitent", indique l'organisation dans un communiqué. "Les développeurs d’applications devraient avoir leur mot à dire dans les projets du ministre de l’Économie de réglementer les plateformes", s'énerve également l'ACT (The App Association), qui regroupe des développeurs et revendique plus de 5.000 membres à travers le monde dans un communiqué diffusé mercredi soir.
"Une large majorité des développeurs que nous avons rencontrés (85 %) ne pensent pas qu’ils sont exploités et considèrent les plateformes comme celles de Google ou d’Apple comme des partenaires cruciaux pour leur succès (38 %) ou comme des outils qui permettent leur croissance", précise l'alliance européenne des développeurs.
Interrogés par Europe 1, plusieurs créateurs d'application louent également l'avantage d'Apple et Google dans la distribution. Certes, ils sont parfois compliqués à contacter, mais leur présence mondiale s'avère être un avantage important. "Ce sont des plateformes de distribution mondiale, nous n'aurions pas la capacité de toucher les américaines ou les chinois sans eux par exemple", indique l'un d'eux à Europe 1. Tous, développeurs comme associations, s'interrogent en réalité sur les raisons qui poussent la France à s'intéresser à un sujet "qui n'a jamais posé problème", pointe le patron d'une société de développement d'applications.
Éclaircir un "malentendu"
Les premiers concernés, Apple et Google, ont également décidé de réagir. Alors que leur parole est assez rare, les deux entreprises ont publiés des communiqués. Apple explique avoir "toujours défendu la confidentialité et la sécurité des utilisateurs" et assure "ne pas (avoir) accès aux transactions des utilisateurs avec des applications tierces", en réponse aux déclarations de Bruno Le Maire selon lesquelles les plateformes collecteraient les données des utilisateurs sans les fournir aux développeurs. La marque à la pomme indique également être "entièrement disposée à partager (son) histoire devant les tribunaux français et à éclaircir ce malentendu" et rappelle au passage que "des dizaines de milliers de développeurs à travers la France ont gagné un milliard d'euros sur l'App Store". Un développement qui "n'a été possible que grâce à l'investissement d'Apple dans iOS, les outils de développement et l'App Store".
Du côté de Google le son de cloche n'est guère différent. La firme de Mountain View considère ses pratiques comme "conformes à la législation française" et se dit "prête à expliquer (sa) position devant les tribunaux". Là encore, l'entreprise met en avant son impact sur l'économie. "Avec plus de 1.000 téléchargements par seconde, Google Play est un excellent moyen pour les développeurs d'applications en Europe, de toutes tailles, dont beaucoup en France, de proposer leurs applications aux utilisateurs du monde entier", assure la société.