L'éditorialiste Yves Thréard liste les raisons qui ont conduit l'ancien Premier ministre à écarter l'idée de revenir dans la course en cas de renoncement de François Fillon.
"En toute hypothèse, je ne serai pas un plan B" : Juppé a répondu sèchement, mercredi soir, aux élus Républicains affolés, qui lui demandaient de remplacer Fillon dans la course à l’Elysée. C’est mal connaître Juppé pour se permettre de l’interpeller ainsi. Comme si Juppé avait une tête de plan B !
Cet homme intelligent et d’expérience n’entend pas jouer les roues de secours. Il a une bien trop haute idée de lui-même pour accepter de jouer les utilités de service. Pour lui, c’est insultant. Juppé, il faut le traiter en majesté, aller le chercher, lui répéter qu’il "est le meilleur d’entre nous", comme disait Chirac. Juppé est non seulement droit dans ses bottes, il est aussi raide dans sa supériorité.
Mais c’est peut-être aussi parce qu’il a peur de la défaite ?
Et il a raison ! Quelle que soit son issue, l’affaire Fillon reste un tsunami, risque de laisser des traces dans l’opinion et de condamner la droite à faire banquette pendant cinq ans. Remobiliser l’électorat à moins de 80 jours de la présidentielle relève d’une mission quasi impossible.
Et puis sur quel projet Juppé irait-il au combat ? Pas celui de Fillon, qu’il a critiqué, trouvé trop radical, "infaisable" pendant la primaire : Juppé passerait pour un homme sans foi ni conviction. Sa sincérité, son honnêteté seraient mises en doute.
Mais, pour ne pas perdre la face, la droite pourrait quand même se satisfaire des idées de Juppé ?
Certes, d’autant que Juppé plaît au centre, obtiendrait peut-être le soutien de Bayrou, et pourrait mordre sur le centre-gauche. Mais sur ce créneau-là, Macron a des longueurs d’avance et l’atout de la jeunesse. Pour tenter de relever le gant, Baroin ou Bertrand, un visage neuf, aurait plus de chances qu’un perdant de la primaire. Fillon hors-jeu, la réponse de la droite ne peut qu’être générationnelle.