Le dérapage du déficit de la Sécu pire que prévu

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La Commission des comptes de la Sécurité sociale prévoit un déficit de 16,6 milliards en 2024. Le déficit dérape de 60% (+6 milliards) en raison surtout de recettes moins favorables qu'attendues. 

Les comptes de la Sécu vont se dégrader davantage que prévu en 2024, selon la Commission des comptes de la Sécurité sociale qui prévoit un déficit de 16,6 milliards en 2024, contre 10,5 milliards initialement programmés dans le budget de la Sécurité sociale 2024. Le déficit dérape de 60% (+6 milliards) en raison surtout de recettes moins favorables qu'attendu : "la dégradation proviendrait pour l'essentiel des recettes de prélèvements sociaux sur les revenus d'activités et des recettes fiscales", explique la Commission dans un rapport présenté jeudi à Bercy, en présence des ministres "sociaux".

Regonfler les recettes 

Cette dégradation "traduit principalement l'actualisation des hypothèses économiques" faite par le gouvernement en avril dans le cadre du "programme de stabilité", les prévisions budgétaires transmises à l'Union européenne, ajoute-t-elle. Le gouvernement avait alors reconnu que le déficit public dans son ensemble atteindrait 5,1% du PIB en 2024, au lieu des 4,9% escomptés précédemment. Pour 2023, la Commission des comptes de la sécurité sociale alourdit également la note. Le déficit de la Sécurité sociale n'est pas de 8,7 milliards d'euros en 2023, comme l'estimait le gouvernement dans le budget de la Sécu 2024 (loi de financement de la Sécurité sociale, LFSS), mais de 10 ,8 milliards d'euros, indique-t-elle.

Mercredi, avant que cette dégradation des prévisions ne soit annoncée, la Cour des comptes avait déjà tiré la sonnette d'alarme sur l'évolution des comptes sociaux. Ils "montrent une dégradation continue" et "non maitrisée" du déficit de la Sécu, indiquaient la Cour, qualifiant "d'insoutenable" la progression prévue du déficit sur les années à venir.

 

Parmi ses recommandations pour tenter de reprendre le contrôle, la Cour des comptes suggère notamment de s'attaquer à la progression des dépenses d'indemnisation des arrêts de travail, énumérant une série de mesures possibles, dont l'augmentation à 7 jours du délai de carence. Les sages de la rue Cambon proposent également de regonfler les recettes à la Sécu en s'attaquant aux exonérations de cotisations sociales sur les compléments de salaire (financement des complémentaires santé, prévoyance et retraite supplémentaire, aides directes comme les titres restaurants, partage de la valeur comme l'intéressement ou la participation...).

L'aggravation du déficit prévue en 2024 concerne les 5 branches de la Sécurité sociale, mais la branche maladie et la branche vieillesse en portent l'essentiel. Dans les nouvelles prévues, la branche maladie sera déficitaire de 11,4 milliards d'euros (contre 8,5 mds initialement prévus dans le budget de la Sécu 2024), tandis que la branche vieillesse sera déficitaire de 8,3 milliards, (contre 5,8 milliards prévus). 

"Il faut organiser une conférence des financiers" 

La Commission des comptes de la Sécurité sociale a présenté ses travaux jeudi à Bercy, en présence notamment des ministres Catherine Vautrin (Travail, Santé et Solidarités), Thomas Cazenave (Comptes publics) et Frédéric Valletoux (délégué à la Santé). "Il faut organiser une conférence des financiers" de la Sécu pour augmenter les recettes de celle-ci, plutôt que de couper dans les dépenses, a augmenté l'un des participants à la réunion, Dominique Corona, secrétaire général adjoint de l'Unsa et membre du conseil de la Caisse nationale d'Assurance maladie (Cnam).

Outre la question de la dette Covid, le syndicat propose "la socialisation des compléments de salaires tels que la prime de partage de la valeur ajoutée, les heures supplémentaires, etc. qui représentent un manque à gagner de plus 19 milliards d'euros", l'augmentation des taxes sur l'alcool, le tabac ou encore les produits sucrés. Il souhaite en outre aborder les exonérations des cotisations employeurs qu'il estime à "75 milliards d'euros".