Jean-Emmanuel Ray, juriste et professeur à l’Ecole du droit de la Sorbonne, était l’invité de David Abiker, samedi dans C'est arrivé cette semaine, pour parler du projet de loi El Khomri, présenté en Conseil des ministres le 9 mars prochain.
"C’est une surprise pour nous, on ne s’attendait pas à un texte d’une telle portée", a affirmé Jean-Emmanuel Ray, invité samedi matin de David Abiker, dans C'est arrivé cette semaine, sur Europe 1. Ce juriste spécialiste du droit du travail a fait part de son analyse sur le projet de loi sur la réforme du Code du travail, mené par la ministre de l'Economie Myriam El Khomri. "Et y compris sur le plan politique, c’est un texte qui ne correspond pas à ce que l’on pouvait attendre", poursuit cet agrégé de droit privé et de sciences criminelles.
D'ailleurs, "il n’est pas sûr que la loi soit votée telle quelle", prévient-il, craignant le pire "en termes de charcutage parlementaire" pour ce "texte multiple et intrépide". Celui-ci sera en effet examiné début avril à l'Assemblée nationale, après avoir été présenté le 9 mars prochain en Conseil des ministres.
Quid des 35 heures ? Parmi les incontournables du projet de loi, les 35 heures - "une obsession française", dixit Jean-Emmanuel Ray - qui devraient être assouplies. Vont-elles devenir une exception, alors que les possibilités de négociation offertes par le texte sont assez larges ? "On négocie depuis toujours les 35 heures, on a toujours pu négocier les heures supplémentaires", affirme-t-il. Actuellement, la durée légale du travail - qui sera maintenue - est fixée à 35 heures et les heures supplémentaires sont rémunérées 25% (pour les huit premières) ou 50% (pour les suivantes) en plus.
Le texte prévoit un changement sur la rémunération de ces heures. Mais depuis 2008, et la loi de modernisation sur le marché du travail, "on permettait déjà de les rémunérer moins de 25%", précise le juriste. "On prête à Madame El Khomri des changements qui n’existent pas. Le seul changement dans ce texte […] c’est que, avec l'accord d'entreprise dans les boîtes qui iront mal, on pourra négocier un taux inférieur, mais jamais inférieur à 10%", soutient-il.
Le référendum d'entreprise "est la fin du fait syndical". Quant au référendum d’entreprise, autre mesure phare de la réforme du Code du travail, il consisterait en la possibilité de recourir, pour éviter des situations de blocage, à une consultation salariale en cas d'échec des négociations entre partenaires sociaux. "C'est rarement l'employeur qui demande un référendum, ce sont les syndicats qui ne sont pas assez sûrs d'eux", avance Jean-Emmanuel Ray.
"Instinctivement, on dira : qu'est-ce que vont perdre les syndicats à consulter les salariés ? Puisqu'ils représentent les salariés". Toutefois, "on ne peut pas gouverner par référendum", insiste-t-il, avant de conclure : le référendum, "c'est la fin du fait syndical, si jamais cela se banalise".
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