Alors que le budget 2020 est toujours en discussion à l'Assemblée, Nicolas Beytout dresse un premier bilan de toutes les mesures fiscales annoncées par le gouvernement, notamment sur le pouvoir d'achat des Français.
La discussion du budget 2020 se poursuit à l’Assemblée. L’occasion d’évaluer la portée de toutes les mesures fiscales annoncées par le gouvernement.
Oui, c’est ce qu’a fait un institut de recherche indépendant, l’Institut des Politiques Publiques, qui s’est concentré sur le pouvoir d’achat des Français. Le pouvoir d’achat, c’est ce qui reste dans le portefeuille une fois payés tous les impôts et toutes les taxes. Compte tenu des baisses promises de l’impôt sur le revenu, et de la taxe d’habitation, celui-ci devrait augmenter en 2020.
Et ce sera le cas ?
Oui, pas de mauvaise surprise de ce côté-là : les baisses d’impôts font leur effet. Mais le plus intéressant, c’est de regarder pour qui le pouvoir d’achat augmente le plus. Pour une fois, ce sont les classes moyennes qui touchent les dividendes de cette politique. Et parmi elles, ce sont les classes moyennes supérieures qui s’en tirent le mieux.
Les classes moyennes supérieures, c’est-à-dire, concrètement ?
Les ménages qui gagnent environ 2.500 à 3.000 euros par mois. Jusqu’alors, ils tombaient toujours dans la trappe fiscale. On disait qu’ils étaient trop riches pour recevoir des aides, et trop pauvres pour bénéficier des baisses d’impôt, par exemple l’ISF. Ils étaient trop riches pour avoir la cantine des enfants gratuite, trop riches pour profiter de la prime d’activité, mais trop pauvres pour engranger une baisse de la fiscalité sur le patrimoine. Cette fois, et c’est suffisamment rare pour être noté, ces ménages aisés, souvent des cadres, ont été davantage soignés.
Et comme vous pouvez l’imaginer, ceci n’est pas neutre politiquement : c’est dans ces catégories socio-professionnelles que se situe une bonne partie de l’électorat d’Emmanuel Macron.
Cette bonne vendange pour les classes moyennes, c’est l’effet "gilets jaunes", j’imagine ?
Absolument : défiscalisation des heures supplémentaires, baisse de l’impôt sur le revenu. On est pile dans la cible. C’est bien joué, et plus encore si on regarde ce qui va se passer pour les ménages les plus riches. Leur pouvoir d’achat va augmenter, lui aussi, mais en proportion presque deux fois moins que pour les autres. Cette fois, Macron ne pourra pas être taxé de "Président des riches".
Et pour les Français les plus modestes ?
C’est plus compliqué : ils ne payent pas d’impôt sur le revenu, pas non plus de taxe d’habitation. Leur pouvoir d’achat, c’est donc ce qui reste après qu’ils ont touché des aides, les allocations logement ou le RSA, par exemple. Il augmente, mais moins que pour les classes moyennes. Priorité à ceux qui travaillent, comme le dit le ministre des Finances, Bruno Le Maire. Là aussi, c’est un choix très politique qu’assume à juste titre le gouvernement. Désormais, c’est priorité à ceux qu’on pourrait appeler les milieux de cordée.