Violences policières : la course contre la montre de Christophe Castaner

2:45
  • Copié
, modifié à

Alors que les manifestations se multiplient en France contre le racisme et les violences policières, la réaction d'Emmanuel Macron se fait toujours attendre. Si son ministre de l'intérieur, Christophe Castaner, a réagi lundi avec plusieurs annonces concernant la police, sa prise de parole a été très tardive pour l'éditorialiste Nicolas Beytout.

Les rassemblements en mémoire de George Floyd se dérouleront en France sous haute tension. 

Oui, ce sera un nouveau défi pour les forces de l’ordre (un défi sanitaire aussi, bien sûr, avec ces milliers de manifestants ; mais depuis la semaine dernière, on a l’impression que ce n’est même plus un sujet, passons…). En tout cas, le moindre incident lors de ces manifestations risquerait d’être utilisé au centuple. Car, il ne faut pas être naïf, ces mouvements de protestation contre les violences policières et le racisme sont très structurés, et pour certains très politisés, bien sûr. 

En tout cas, Christophe Castaner a averti la police : aucune forme de racisme ne doit plus être tolérée. 

Oui, il était temps. Non pas que la situation aux Etats-Unis soit le moins du monde comparable avec ce qui se passe dans la police en France. La violence de la société n’est pas la même, la violence dans et contre la police n’est pas la même, et le racisme de la société française n’a rien à voir avec la trace historique du racisme dans la société américaine. Toute tentative d’importation et d’amalgame entre la mort atroce de George Floyd à Minneapolis, et ce qui peut se produire parfois en France, est vraiment inapproprié.

Mais trop de temps s’est écoulé entre le déclenchement de l’affaire, aux Etats-Unis, et la réaction du gouvernement en France. En particulier, Emmanuel Macron ne s’est pas exprimé publiquement.

Mais il a demandé au gouvernement de se saisir du sujet. 

Oui, ce qui traduit une forme d’embarras. Il faut dire que le dosage est assez délicat. Plus la prise de parole du politique est forte et vient de haut, et plus elle peut donner le sentiment qu’il y a un sujet de racisme de la police en France. A l’inverse, ne pas en parler, ne pas envoyer de signal politique, c’était laisser le mouvement de protestation se développer et prospérer en dénonçant l’indifférence des pouvoirs publics à cette cause.

En fait, Christophe Castaner aurait dû s’exprimer très vite, pour protéger l’échelon supérieur, en l’occurrence Emmanuel Macron. Cela aurait aussi évité que se développe une sentiment diffus, dans une partie de la population, que les forces de l’ordre ont une déontologie à géométrie variable. 

Beaucoup d’observateurs disent craindre une jonction des manifestants avec la Gilets jaunes.

Oui, parce qu’on a vu un de leurs leaders, la semaine dernière, parmi les milliers de gens massés au pied du Palais de Justice. Mais les mêmes craintes de coagulation des luttes avaient été exprimées par les mêmes observateurs au moment de la réforme de la SNCF, puis de celle des retraites, sans oublier les petits départs de feu réguliers dans l’éducation et les universités.

Mais à mon sens, le vrai danger n’est pas là. Il est dans le climat social, dans les suites sociales de la crise économique due au coronavirus. C’est à l’automne que cette vague-là déferlera. On ne sait pas si elle générera de la colère ou de l’abattement, mais en attendant, et à toutes fins utiles, le gouvernement a tout intérêt à préserver, à protéger et à ménager sa police.