Chaque matin, Nicolas Beytout analyse l'actualité politique et nous livre son opinion. Ce vendredi, il revient sur le manque d'autorité du Premier ministre qui s'illustre par les nombreux couacs au sein de la majorité.
Les députés vont devoir revoter sur l’état d’urgence sanitaire. L’objectif est de faire oublier un couac spectaculaire.
Les députés de La République en Marche ont commis une sacrée bourde en début de semaine. Ils ont laissé l’opposition imposer, contre l’avis du gouvernement, que l’état d’urgence sanitaire se termine à la mi-Décembre et non pas en Février prochain. Ce couac est imputable à Christophe Castaner, le nouveau patron du groupe parlementaire qui devait ramener de l’ordre parmi les soutiens d’Emmanuel Macron. Que, dans un moment aussi tendu de la lutte contre le Covid, le gouvernement n’arrive même pas à entraîner sa majorité ne donne pas une très bonne image de la gestion de la crise. C’est un caillou de plus dans la chaussure de Jean Castex.
Un de plus ?
Les problèmes s’accumulent et tous reviennent à une question d’autorité. Autorité de sa parole comme lorsqu’il s’exprime sur TF1, dimanche soir, pour expliquer sa position sur le petit commerce et le confinement. Les mauvais esprits ne retiennent qu’un geste maladroit, involontaire certes, mais qui peut paraître déplacé. Les esprits affûtés, eux, retiennent que le Premier ministre a pris une position qui n’était pas en ligne avec celle du chef de l’État sur un sujet pourtant bouillant en ce moment : le rapport au colonialisme. Mais pour le reste de ses propos, pas ou peu de trace. Ça ne marque pas.
Il faut dire que Bruno Le Maire avait dévoilé, un peu plus tôt dans la journée, la décision de fermer les rayons de grandes surfaces vendant des produits dits "non essentiels".
C’est vrai. Mais là, ça pose un problème d’autorité d’une autre nature, celle qu’un Premier ministre devrait imposer à son équipe. C’est un fait, Jean Castex n’a pas eu le cuir tanné sur les bancs des parlementaires. Il n’a jamais été ministre, ni eu de fonction d’envergure dans un parti politique. Les personnalités qu’il a à gérer dans son gouvernement ont toutes leur savoir-faire. Les Le Maire, Blanquer, Véran ou Darmanin, peuvent avoir leur propre agenda et leur partition à jouer. Difficile pour quelqu’un qui n’a jamais fait de musique à ce niveau-là d’apparaître comme un chef d’orchestre. Et difficile aussi d’empêcher les couacs.
Comme la sortie de Gabriel Attal sur le couvre-feu que Matignon a tout de suite démenti ?
Absolument. Un problème d’autorité dans les arbitrages, cette fois. Mais on pense aussi au dérapage d’Olivier Véran qui pique une énorme colère au Parlement et enjoint aux députés qui ne sont pas d’accord de sortir de l’hémicycle. Évidemment, ce n’est pas le Premier ministre qui à craquer comme ça sous la pression. Mais tout ça donne une impression de grande fragilité là où, pendant ces crises terribles que nous traversons, on aurait besoin du contraire. Et tout ça laisse le chef de l’État sans véritable protection, sans première ligne ni parlementaire ni gouvernementale pour défendre sa politique. En se séparant d’Édouard Philippe, le président voulait ramener le pouvoir à lui. C’est fait, mais il se retrouve trop seul.