Des centaines et des milliers de milliards de dollars et d’euros vont être déversés sur les économies occidentales pour surmonter la crise. Et c’est du jamais vu…
Non, jamais aucun pays n’avait mobilisé aussi vite autant d’argent. Tout s’est décidé en quelques jours, ce qui correspond à la violence et à la soudaineté du choc et à la brutalité de l’arrêt des économies occidentales. Jamais aussi vite, et jamais avec autant d’argent. Les sommes évoquées donnent le vertige. Aux Etats-Unis, ce sont 1500 milliards de dollars. L’Europe a déjà aligné 750 milliards d’euros, et il ne serait pas étonnant qu’il y en ait encore. La France a acté une première rallonge budgétaire de 45 milliards et des garanties pour 300 milliards d’euros. Même chose en Allemagne qui renonce à sa politique d’équilibre des finances publiques avec 150 milliards rendus disponibles par l’Etat fédéral, et 600 milliards d’aides possibles.
Et donc, vive l’Etat, vive la puissance publique ?
Oui bien sûr : pour répondre à une crise d’une telle ampleur, une crise qui menace les Etats, il n’y a de réponse valable qu’à l’échelle des Etats. Mais, d’ici à en conclure que c’est le grand retour de la dépense publique, que c’est la fin du libéralisme, que c’est la défaite de l’économie de marché, il y a un pas. Je dirais même que c’est l’inverse.
L’inverse ? C’est-à-dire ?
C’est très simple. Il faut arrêter de croire que l’argent que vont injecter les différents Etats est gratuit. Un, les Etats l’empruntent. Et deux, ils devront, nous devrons le rembourser. Moins un Etat est en bonne santé, avec une économie peu florissante, plus il va emprunter cher, et plus le sauvetage de son pays va lui coûter cher. C’est ce qui se passe avec l’Italie. Le pays est fragile, politiquement et économiquement, l’argent qu’il mobilise pour s’en sortir lui coûte plus cher. Un ministre me disait hier qu’on voyait en vraie grandeur à quel point l’Italie avait en réalité décroché depuis des années. Et puis, il faudra bien rembourser un jour toutes ces sommes faramineuses qui auront été injectées…
C’est pour l’après-crise....
Naturellement. Mais un pays qui a trop de dépense publique et qui est trop endetté (au hasard, la France) mettra longtemps à se libérer de cette charge supplémentaire. Le poids de sa dette, déjà limite, deviendra un vrai handicap. Et comment est-ce qu’il pourra alléger ce fardeau ? En recréant de la richesse, en redonnant à ses entreprises les meilleures conditions pour produire, investir, faire de la croissance, et pour dégager les marges de manœuvre qui permettront de se désendetter. Et ça, c’est le boulot de l’économie de marché, des entreprises. Alors, attention aux idées simples du genre : le coronavirus c’est la fin du libéralisme, le retour de l’Etat. Parce que, à la fin de l’histoire, c’est toujours l’argent privé qui paye pour en sortir.