Chaque samedi et dimanche, Nicolas Beytout, directeur du journal "L'Opinion", donne son avis sur l'actualité de la semaine.
Bonjour Nicolas, vous avez aimé un bulletin météo : celui qui concerne les perspectives d’embauches en France, pour l’année 2019.
Oui, ce sont des prévisions qui ont été dévoilées en fin de semaine par Pôle Emploi, et qui sont assez spectaculaires. Selon près d’un demi-million d’entreprises qui ont été interrogées, les intentions d’embauches vont augmenter de 350.000 postes cette année. Plus 15%, et au total, il y aurait 2,7 millions de projets de recrutements en 2019.
Plus 15%, c’est un record ?
Pas tout à fait : c’était plus 18% l’an dernier. Mais justement, c’est ça qui est impressionnant : le dynamisme du marché de l’emploi, déjà actif l’an dernier, continue à progresser aussi rapidement. Et cela malgré une croissance qui ralentit : vous le savez, le gouvernement et tous les instituts de conjoncture annoncent une croissance qui marque le pas un peu partout dans le monde, et qui en France devrait revenir vers les 1,4%. Ce qui n’est pas terrible, et qui normalement ne devrait pas être une bonne nouvelle pour l’emploi.
Alors, comment est-ce qu’on peut expliquer que, au contraire, les intentions d’embauche progressent si vite. Est-ce parce que, justement, ce ne sont que des intentions ?
Ça pourrait être une explication. Mais en regardant ces chiffres sur plusieurs années, on s’aperçoit que dans 80% des cas, ces intentions déclarées se traduisent par des recrutements effectifs. Donc, ces 2,7 millions de projets de recrutements semblent crédibles. Et ils reflètent une amélioration sur le fond du marché du travail. Et le plus probable, c’est que cette amélioration soit une conséquence des ordonnances sociales prises par le gouvernement il y a 18 mois.
Il y a des éléments tangibles pour dire ça ?
Oui, des signaux très clairs. Vous savez que le marché du travail français est réputé pour ses contrats courts, très courts, même. C’est une plaie typiquement française. Depuis très longtemps, le patronat avait une explication : c’est la difficulté de licencier qui entrave la création d’emploi. Un patron ne crée pas d’emploi parce qu’il ne veut pas prendre le risque de se retrouver collé avec un contrat de travail si l’activité de son entreprise se retourne. Et c’est pour ça, souvenez-vous, que les ordonnances Macron ont assoupli les règles de rupture du contrat de travail.
Aujourd’hui, on constate que près d’un projet de création d’emploi sur deux concerne un CDI. C’est 10% de plus que l’année précédente, et c’est vraiment notable.
Parmi les freins à l’emploi, outre la rigidité du droit du travail, les patrons invoquent souvent le coût du travail. C’est toujours le cas ?
Oui, car les progrès dans ce domaine restent très lents. En même temps que les bonnes nouvelles de Pôle emploi, on a reçu des statistiques établies par l’OCDE et qui démontrent, elles, que la France reste championne du monde développé pour ce qui concerne les charges sociales. C’est chez nous qu’elles sont les plus lourdes : sur 1.000 euros de salaire, il y a en moyenne près de 400 euros de charges. C’est 130 euros de plus que la moyenne. Quelques 130 euros qui manquent au pouvoir d’achat.