Les affaires judiciaires du RN peuvent-elles servir les intérêts d'Emmanuel Macron ?

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Chaque matin, Nicolas Beytout analyse l'actualité politique et nous livre son opinion. Ce lundi, il s'intéresse aux affaires judiciaires du Rassemblement national qui font leur retour médiatique. Selon lui, la perspective de voir la prochaine élection présidentielle biaisée par des procédures judiciaires ne serait bonne pour personne, y compris pour l’actuelle majorité.

L’affaire des assistants parlementaires européens du Rassemblement national est ressortie ce week-end avec la publication d’une note de police détaillant "le système organisé frauduleux de détournement" de fonds publics mis en place par ce parti.

En fait, c’est toujours la même affaire de financement, un mécanisme qui aurait été mis au point par Jean-Marie Le Pen et amplifié par sa fille lorsqu’elle a pris en main le parti. L’instruction a été ouverte en 2016, ce qui a fait dire à Marine Le Pen qu’il n’y avait "rien de nouveau sous le soleil, sauf peut-être de bons sondages en vue". Autrement dit, ressortir cette affaire, c’est une manœuvre politique destinée à l’entraver dans sa course à l’Élysée.

Et c’est crédible ?

Ce qui est sûr, c’est qu’il y a une enquête. Ce qui certain, c’est que le Rassemblement national multiplie les recours pour ralentir l’instruction, et qu’à ce jour, l’affaire est devant la Cour d’Appel de Paris. De ce point de vue, Marine Le Pen a donc raison : s’il y a quelque chose de neuf, ce n’est pas dans la procédure judiciaire, mais dans la relance médiatique de cette affaire. D’où le soupçon qu’elle tente d’instiller sur le thème : le pouvoir refait le coup des juges contre Fillon, il utilise la machine judiciaire contre ses adversaires politiques. Evidemment, absolument rien ne prouve que ce soit vrai, mais l’accusation peut faire mal. Les partisans de Marine Le Pen et tous ceux qui envisagent déjà de voter pour elle en 2022 auront tôt fait de se demander pourquoi diable cette affaire ressort, un an pile avant la présidentielle. Et bien entendu, l’idée du complot n’est pas très loin. 

Sauf qu’il n’y a pas le début d’un commencement de preuve de ce complot.

Absolument aucun. Mais peu importe, ce genre de sentiment ne fonctionne pas avec des preuves, mais avec des intuitions, ou des prémonitions, du style :  Marine Le Pen est l’adversaire la plus dangereuse pour Emmanuel Macron, si une affaire sort, c’est donc lui qui l’a sollicitée. Et à l’appui de cette thèse, on notera par exemple la réaction de Christophe Castaner, le patron des députés de La République en Marche, qui a tapé fort sur ce problème d’argent (et d’argent public) qui mine le Rassemblement national. Le parti présidentiel est d’ailleurs le seul à s’être bruyamment exprimé sur ce dossier de financement de parti politique. Et pour cause, il est trop récent dans la vie politique française pour avoir eu les mêmes problèmes de financement illégal que tous les autres ou presque.

Est-ce que ça veut dire que la majorité n’a pas forcément intérêt à utiliser cette affaire ?

En effet, Nicolas Beytout pense que beaucoup de Français ont eu la nette impression que la justice avait été bizarrement rapide, dans l’affaire Fillon et que la perspective de voir la prochaine élection présidentielle biaisée par des procédures judiciaires ne serait bonne pour personne, y compris pour l’actuelle majorité. La vie démocratique est malade.