Ce mercredi, Nicolas Beytout revient sur la polémique qui secoue la campagne d'un candidat La République en Marche aux élections départementales dans l'Hérault. Sa suppléante, voilée une affiche électorales, a fait se diviser la majorité. Pour le patron de l'Opinion, c'est le symbole de l'ambiguïté qui règne sur ce sujet.
La présence d’une femme voilée sur une affiche électorale de La République en Marche, à Montpellier, continue de faire des remous.
Ce qu’il y a de formidable, avec La République en Marche, c’est que si la politique est une science inexacte, ce parti, lui, est totalement prévisible. Dès qu’il s’agit de laïcité et de voile, il tombe dans tous les panneaux, se prend les pieds dans toutes les polémiques. Dernière en date, cette empoignade autour de la candidature d’une femme voilée, comme suppléante aux élections départementales de l’Hérault. Suppléante, dans un canton, il fallait creuser profond pour la déterrer, cette controverse. Et pourtant, c’est fait.
Stanislas Guérini, le délégué général du parti, a menacé de retirer son soutien si la photo n’est pas changée.
C’est ça, sans que l’on comprenne bien si le problème, c’est le voile, ou la photo, ou les deux. Ce qui est clair, en revanche, c’est que le parti du Président n’a pas mis longtemps à se déchirer. Les députés du coin ont désapprouvé l’affiche, plusieurs de leurs collègues du même groupe parlementaire ont au contraire critiqué leur parti et la prise de position de Stanislas Guérini. Circonstance aggravante, celui-ci avait fixé la ligne du parti dans une réponse à un tacle de Jordan Bardella, comme si, sur ces sujets hautement inflammables, la majorité suivait un ordre du jour fixé par le Rassemblement national. Malaise.
Alors au fait, le problème pour En Marche, c’est le voile ou la photo ?
Ça peut être ni l’un, ni l’autre, ou au contraire les deux. Je m’explique : le port du voile dans un espace public est libre, et être coiffé d’un voile sur une affiche électorale est parfaitement légal. Sauf que cet accessoire vestimentaire dit quelque chose de ce que vous êtes, et de ce que vous proposez. Sur une affiche électorale, il porte évidemment un message. Si vous militez pour un parti à l’aise avec cette vision de la société, cette affiche ira de soi. Mais La République en Marche n’est pas du tout sur cette ligne. Sur cette affiche, la photo et le voile ont une connotation communautariste : c’était donc une erreur politique et Stanislas Guérini a eu raison de s’y opposer.
Et comment est-ce que ça peut se régler en interne, dans le parti ?
Ca ne se réglera pas. Parce que sur ce sujet, c’est l’ambiguïté qui règne. Les ailes droite et gauche de ce mouvement "en-même-temps" sont totalement divisées. Et rien n’a été fait pour les rapprocher. Les sujets n’ont pourtant pas manqué, les polémiques passées auraient pu être autant d’occasions de purger ce conflit. Mais non, le problème n’a jamais été tranché. Au contraire : il y a quelques semaines seulement, le gouvernement avait une occasion en or, avec sa loi sur les séparatismes. Mais non : le texte, présenté par Gérald Darmanin et Marlène Schiappa, a soigneusement évité de parler du voile. En somme, ces choses-là nous dépassent, feignons de ne pas les avoir remarquées. Ce n’est même pas une boussole qui indique le sud, c’est une boussole qui n’indique rien.