Ils ont évoqué leur droit de retrait, mais pour Nicolas Beytout c'est bel et bien à une "grève sauvage" que se sont livrés les cheminots. Un mouvement qui risque d'ailleurs d'handicaper la CGT dans son prochain combat : la réforme des retraites.
Le trafic SNCF a lentement et progressivement repris durant le week-end. Et ce matin, il est quasi-normal. On dit quoi : ouf !?
Oui, ouf pour les centaines de milliers de voyageurs qui ont déjà été bloqués un jour de grands départs en vacances. Qu’au moins eux, comme tous ceux qui travaillent, soient rassurés : cette prise en otage est terminée. Car c’est bien de cela qu’il s’agit : une prise d’otage sociale. Cette grève surprise était illégale, déclenchée pour un motif sérieux, certes, mais sur une base qui est un véritable détournement du droit de grève.
Les cheminots ont invoqué leur droit de retrait.
A tort : ce droit est individuel, le mouvement a été collectif, et vraisemblablement orchestré par la CGT. Et ce droit de retrait peut être exercé lorsqu’il y a "un danger grave et imminent". Où est le danger imminent ? Il y a eu un accident à un passage à niveau ; le conducteur a courageusement réagi pour alerter tout le monde. OK, mais où est le danger imminent ? A chaque passage à niveau ? A chaque fois qu’un convoi exceptionnel prend la route ? Ça n’a pas de sens.
Les grévistes affirment que le risque d’un accident en chaîne aurait été moindre s’il y avait eu un deuxième agent à bord.
Argument spécieux : si lui aussi avait été blessé, il aurait fallu un troisième agent SNCF dans les trains. Non, c’est une grève sauvage, comme l’a dit le Premier ministre, et j’espère qu’il y aura des suites financières et judiciaires.
C’est ce qu’a promis Edouard Philippe.
Oui, j’espère juste qu’il ira jusqu’au bout. Car souvenons-nous : depuis que Nicolas Sarkozy avait imposé par la loi l’interdiction de payer les jours de grève à la SNCF, le nombre d’arrêts de travail a bien diminué. Mais vous savez, le fait qu’Edouard Philippe lui-même se soit déplacé en pleine grève pour la condamner, c’est exceptionnel. Et ça dit bien à quel point le gouvernement a compris que le motif essentiel de la grève n’était pas dans cet accident, aussi regrettable qu’il soit. Et que c’est une grève d’avertissement.
Avant la réforme des retraites, et les grèves du 5 décembre prochain ?
Oui, bien sûr, et la réforme du statut de la SNCF qui entre en vigueur au 1er janvier prochain. La CGT qui avait perdu son combat contre la grande réforme de 2018 semble vouloir essayer de prendre sa revanche au moment de son application. Mais ce syndicat a fait une erreur : cette grève surprise a pris de court tellement de monde, a gêné tellement de voyageurs, qu’elle a généré beaucoup de colère. Dans son prochain combat sur les retraites et le statut, la CGT part donc désormais avec un handicap de popularité. Elle a sûrement perdu ce weekend le soutien de pas mal de Français.