Présidentielle : Emmanuel Macron met fin à la rumeur de report de l'élection

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Chaque matin, Nicolas Beytout analyse l'actualité politique et nous livre son opinion. Ce jeudi, il revient sur la rumeur, démentie hier par Emmanuel Macron en Conseil des ministres, sur l'hypothèse d'un report de l'élection présidentielle à cause de la crise sanitaire.

Emmanuel Macron est intervenu en Conseil des Ministres, ce mercredi, pour écarter toute idée de reporter l’élection présidentielle.

Une déclaration faite dans un cadre solennel pour tenter de tordre le cou à une rumeur qui enflait depuis trois jours. La raison, c’est évidemment la montée en puissance très rapide de la 5ème (ou de la 6ème vague, on ne sait plus trop) du Covid.

A deux reprises déjà, cette épidémie avait bousculé un rendez-vous électoral en France : la première fois, c’était en 2020 pour les municipales (le premier tour s’était déroulé dans des conditions surréalistes de quasi-confinement, et le second tour avait été repoussé de plusieurs mois). Un scénario qui s’est répété à l’occasion des élections régionales, qui devaient se tenir en mars dernier mais ont été décalées à 2 reprises, mi-juin puis fin-juin.

Pourquoi pas cette fois pour la présidentielle, si les conditions sanitaires ne sont pas davantage remplies ?

Effectivement, la question pouvait se poser. Et cette hypothèse a pris de la consistance lorsque le journal Le Parisien a révélé que le ministre de l’Intérieur (qui est en charge de l’organisation des élections) avait sollicité le Conseil constitutionnel pour, dit-on dans son entourage, « discuter des modalités de scrutin dans le contexte sanitaire ». Ah tiens, les modalités de scrutin ? C’est donc qu’il y a un projet caché, en ont immédiatement conclu quelques esprits affûtés et soupçonneux. Gabriel Attal, le Porte-parole du gouvernement avait eu beau démentir, à deux reprises, en des termes sans équivoque, la rumeur était là.

Il a donc fallu l’intervention du chef de l’Etat pour y mettre fin et tuer dans l’œuf tout ce qui pourrait laisser penser que le gouvernement fuirait le débat politique et la campagne.
Mais est-ce que, juridiquement, ça reste une possibilité ?

En l’état actuel du droit, non, il ne semble pas. La Constitution prévoit trois cas de report total ou partiel de l’élection présidentielle, mais à chaque fois, c’est lié à une indisponibilité ou à la disparition d’un candidat. Ça veut dire que pour contourner ça, il faudrait réviser en extrême urgence la Constitution, autant dire que ce serait tout un barnum.

Et surtout, ça deviendrait instantanément un énorme sujet de polémique politique. Les candidats qui sont déjà lancés dans leur campagne verraient leurs plannings bouleversés, et celui qui ne s’est pas encore déclaré (Emmanuel Macron) aurait tout le bénéfice de celui qui contrôle la situation et reste au pouvoir au-delà de la fin de son mandat.

Parce que, bien sûr, prolonger le mandat d’un maire ou d’un conseiller régional (comme on l’a fait ces deux dernières années), ça n’a pas la même portée que de laisser un chef de l’Etat en place. Ce serait un énorme défi démocratique…

Mais que se passerait-il si le pays était complètement hors d’état de voter, si un confinement était à nouveau imposé, ou si la campagne électorale avait été rendue impossible par les mesures de restriction sanitaire ?

C’est le problème. Le pays est aujourd’hui aussi démuni qu’il l’était pour les municipales et les régionales. Rien n’a été fait pour envisager cette hypothèse, et à part quelques essais à l’occasion du vote des Français de l’étranger, rien de consistant n’a été fait pour étudier des solutions alternatives. Elles existent pourtant, et sont pour la plupart appliquées dans des grands pays démocratiques. Je pense au vote par anticipation, au vote par correspondance, ou au vote par internet.

Pour le moment, la France a toujours repoussé l’examen sérieux de ces pistes, en considérant que la technologie présentait trop de risques. Voilà donc un pays dans lequel un nombre incalculable de citoyens gèrent leur compte en banque, payent leurs impôts, font une partie de leurs démarches par Internet, mais qui seraient incapables de voter pour tel ou tel ? Tout le monde n’a pas Internet, explique-t-on. OK, alors le vote par correspondance peut éviter les files d’attente devant les bureaux de vote.

Non, la réalité, c’est que pour ce sujet comme pour tout ce qui relève de la réforme des institutions, Emmanuel Macron n’a pas concrétisé ses promesses. Il ne s’est rien passé dans ce domaine de tout le quinquennat. Et le Covid risque de nous le faire payer.