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Chaque matin, Nicolas Barré, directeur de la rédaction des Échos, fait le point sur une question d'actualité économique. Aujourd'hui, il revient sur les difficultés du géant de l'agroalimentaire Danone.

Le patron de Danone, sous la pression de certains actionnaires, a dû abandonner la direction opérationnelle. Le géant français de l’agroalimentaire est fragilisé…

"Danone, c’est un fleuron du capitalisme français. Vous vous souvenez du branle-bas de combat en 2005 quand il y avait eu des rumeurs d’OPA d’un groupe américain ? Jacques Chirac, alors président, s’était mobilisé pour défendre ce joyau de notre patrimoine économique. Alors quand Danone, entreprise plébiscitée par les jeunes diplômés, traverse une crise, ça ne laisse pas indifférent. Que se passe-t-il ? Depuis quelques temps, des actionnaires dits 'activistes', c’est-à-dire qui savent mettre le doigt sur les faiblesses des entreprises, critiquent la gestion de Danone et de son PDG Emmanuel Faber, lequel, sous la pression, a dû accepter de partager son pouvoir. Il va garder la présidence mais il cohabitera bientôt avec un directeur général qui sera le patron, ou la patronne, opérationnel(le).

Que lui reprochent ces actionnaires activistes ?

Ils pointent le fait que les performances de Danone sont moins bonnes que celles de ses concurrents comme Nestlé et Unilever. C’est vrai : l’an dernier, le chiffre d’affaires de Danone a légèrement reculé contrairement aux deux autres et ses marges sont plus faibles. Mais la comparaison est un peu trompeuse car ils ne sont pas tout à fait sur les mêmes métiers. Ceux de Danone, par exemple l’eau minérale, ont plus souffert de la crise du Covid-19.

Ces actionnaires minoritaires s’agitent donc depuis un certain temps. Certains réclamaient même le départ du PDG. D’autres, au minimum, la dissociation des fonctions de président et de directeur général : un partage du pouvoir qui est de plus en plus répandu. Plus de la moitié des groupes du CAC 40 ont adopté ce mode de fonctionnement qui crée davantage de contre-pouvoirs. Cela a été le cas tout récemment chez Bouygues ou L’Oréal.

C’est aussi la personnalité du patron de Danone qui était visée…

Oui Emmanuel Faber a les qualités et les défauts d’un visionnaire. En plein Covid, ce patron de conviction a fait de Danone une entreprise à mission, dotée d’une 'raison d’être' par laquelle le groupe s’engage sur des objectifs sociétaux et pas seulement sur la recherche pure du profit. Mais Emmanuel Faber est aussi critiqué pour son exercice solitaire du pouvoir, pas assez proche du terrain et des réalités de chaque marché. Sa mission va être maintenant de trouver un directeur général ou une directrice générale, l’essentiel étant que le partage des rôles soit clair : à l’un la vision, à l’autre la gestion. Ce n’est pas le plus simple. Mais l’enjeu est important : Danone, c’est plus de 100.000 salariés, 24 milliards d’euros de chiffre d’affaires, une 'cathédrale' du capitalisme français qui ne laisse personne indifférent."