La crise sanitaire et le "quoi qu'il en coûte" ont fait explosé la dette française de 400 milliards d’euros supplémentaires. Le ministre des Finances, Bruno Le Maire, a proposé ce lundi devant les députés de réserver une part des impôts existants pour rembourser ce surcroît de dette. Nicolas Barré fait le point sur une question d'actualité économique.
Que faire de la dette Covid ? La rembourser ? L’annuler ? Bruno Le Maire veut couper court au débat.
Tout le monde est à peu près d’accord sur un point, la dette que nous avons accumulée pendant la crise sanitaire peut être mise à part. Cette crise nous est tombée sur la tête, il a fallu y faire face et c’est ce qui a fait exploser notre dette, de 100 à 120% du PIB. En gros, nous nous retrouvons avec 400 milliards d’euros de dette en plus, et cette dette exceptionnelle, on peut la mettre à part. La question qui suit, c’est pour quoi faire ? Certains veulent la mettre à part pour l’annuler d’un trait de plume. D’autres disent au contraire qu’il faut la rembourser en créant une taxe spécifique, comme on a fait avec la CRDS pour rembourser la dette de la Sécu.
Bercy ne veut aucune de ces deux solutions.
Non, pas de taxe nouvelle, Bruno Le Maire l’a catégoriquement exclu, mais pas question non plus de ne pas rembourser, ce ne serait pas sérieux. Alors que faire ? Le ministre des Finances a proposé ce lundi devant les députés une troisième voie qui consiste à réserver une part des impôts existants pour rembourser ce surcroît de dette. Mais pas tout de suite. Seulement lorsque l’économie ira mieux, que la croissance sera revenue et donc qu’il y aura plus de recettes fiscales. C’est là l’originalité de la proposition. L’argument de Bercy consiste à dire qu’il ne faudrait pas assommer la reprise avec ce fardeau de dette à rembourser.
Mais le fardeau est toujours là.
Oui mais l’idée est de donner un gage de sérieux et de crédibilité aux investisseurs du monde entier, dont on doit conserver la confiance pour pouvoir continuer à se financer dans de bonnes conditions. Cette dette du "quoi qu’il en coûte", nous la rembourseront "quoi qu’il arrive" puisque nous nous engageons à y consacrer une fraction définie à l’avance de nos recettes fiscales. Plus largement, ce qui nous manque, c’est d’être capables de programmer nos dépenses publiques sur plusieurs années : ça aussi, ce serait un gage de sérieux. Une sorte de "règle d’or" qui permettrait d’éviter les dérives des comptes publics d’année en année et de fixer le rythme de progression des dépenses pour la durée d’un quinquennat par exemple. Reste à voir si un candidat à la présidentielle serait prêt à s’engager sur une telle promesse de sérieux budgétaire. Et de s’y tenir. Ça ne s’est jamais vu.