En exigeant des Chinois qu'ils vendent les activités américaines de TikTok à un Américain s'ils souhaitent continuer à pouvoir exister aux États-Unis, Donald Trump rend la monnaie de sa pièce à Pékin qui agit de la même façon. Nicolas Barré fait le point sur une question d'actualité économique.
Si vous ne connaissez pas TikTok, vous passez à côté d’un phénomène mondial. Cette application d’origine chinoise a été téléchargée plus de deux milliards de fois et rend fou Donald Trump.
Le dossier TikTok fait partie des urgences de Donald Trump et cette histoire est hors du commun. TikTok est un réseau social sur lequel on s’échange des petites vidéos virales. Les Américains adorent, il y a plus de 100 millions d’utilisateurs actifs aux États-Unis et déjà plus de 800 millions dans le monde. Le problème c’est que TikTok est chinois. Or un réseau social chinois, avec ce que cela veut dire en termes de contrôle des données personnelles, peut-il s’infiltrer dans des millions de foyers américains ? Pour Donald Trump, la réponse est non et il a donné jusqu’au 20 septembre à TikTok, plus précisément à sa maison mère chinoise ByteDance, pour vendre les activités américaines de TikTok à un Américain. Sans quoi, la société serait interdite.
Il a fait plier les Chinois ?
Un accord a été conclu ce lundi pour la vente de ces activités au géant américain du logiciel Oracle, dont le fondateur, Larry Ellison, est un proche de Trump, ça aide. Pour continuer à opérer aux États-Unis, TikTok devra donc s’associer à Oracle. C’est un peu comme si nous en Europe, nous disions à Facebook que pour continuer à opérer chez nous, il faudrait qu’ils vendent leurs activités européennes à un groupe français ou allemand. Les États-Unis exigent en fait des Chinois ce que les Chinois imposent au monde entier. Vous voulez accéder à notre marché ? Vous devez faire alliance avec un groupe local, conclure une joint-venture et partager votre technologie. Washington rend à Pékin la monnaie de sa pièce.
Cette affaire montre aussi que les Américains s’inquiètent de voir la Chine devenir une grande puissance technologique.
Trump cherche par tous les moyens à ralentir la montée en puissance du rival chinois, c’est le sens de la guerre qu’il mène sur la 5 G avec Huawei. L’argument de la sécurité des données personnelles est bien pratique mais la vérité, c’est aussi que les Chinois rivalisent avec les géants américains de la tech et font parfois mieux comme dans les équipements de télécoms. Donc Trump monte au front, mais l’Europe aussi. La présidente de la Commission Ursula von der Leyen a dit ce lundi lors d’un sommet avec le président chinois qu’il fallait "rééquilibrer les asymétries" avec Pékin. Ce n’est pas du Trump, mais ça veut dire à peu près la même chose : ne soyons pas naïfs face à Pékin. Le monde se durcit.