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Chaque matin, Nicolas Barré fait le point sur une question d'actualité économique.

Huawei, le nom de ce fabricant chinois d’équipements de télécoms est devenu synonyme d’espionnage. Fantasme ou réalité ? En tout cas, les militaires français s’inquiètent.

C’est pour cette raison qu’une proposition de loi visant à protéger les intérêts de la défense et de la sécurité nationale dans le cadre du développement des réseaux 5G est examinée ces jours-ci par les députés. La 5G, c’est quoi ? C’est une nouvelle génération de réseaux mobiles prévue à partir de 2020 et qui permettra de connecter beaucoup plus que les téléphones : toutes les infrastructures sont concernées, les usines, les hôpitaux, les ports, les objets dans votre cuisine, les véhicules. La 5G sera partout et aura un rôle critique dans tous les domaines de la vie civile. D’où les inquiétudes si un acteur chinois comme Huawei se retrouve au cœur de ce gigantesque réseau de données.

 

À fortiori, si le réseau 5G a aussi des applications militaires ?

Le dilemme des militaires est évident : utiliser un réseau dédié plus fiable mais moins performant ou s’appuyer sur un réseau à beaucoup plus fort débit, la 5G, au risque que des données critiques se retrouvent captées par les grandes oreilles chinoises. Un très haut dirigeant américain en visite à Paris m’a dit cette semaine qu’à Washington, on surnomme Huawei la « NSA chinoise » en raison de ses capacités supposées de récupération de données. Huawei, d’ailleurs, a été fondée par un ancien officier de l’Armée de libération chinoise. Le chef de l’OTAN, Jens Stoltenberg, a mis en garde les pays de l’Alliance contre Huawei. Le commandant des forces alliées en Europe, le général américain Curtis Scaparrotti, a même déclaré au Congrès il y a quelques jours qu’il craignait que nos systèmes de communication ne soient compromis : "la 5G a une capacité incroyable à aspirer des données". Et il a prévenu les Européens : "si vous intégrez la 5G dans vos communications militaires, on ne communiquera plus avec vous".

Et que peut faire la loi française pour limiter cela ?

La proposition de loi vise à faire remonter au Premier ministre toute demande d’utilisation de ces réseaux par les militaires. Mais on voit bien que la question va au-delà. Huawei inquiète parce que la loi chinoise oblige les sociétés dont le siège se trouve en Chine à collaborer avec les services de renseignement et à leur fournir toutes les données demandées. Or la question dépasse le militaire : ce sont bien sûr les données civiles, économiques, qui intéressent les Chinois. Avec la 5G, l’Europe découvre qu’elle a perdu une partie de son indépendance technologique et donc stratégique. Voilà un sujet dont les candidats aux Européennes devraient s’emparer et sur lequel on ne les entend pas assez.