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François Clemenceau revient chaque matin sur un évènement international au micro d'Europe 1 Bonjour.

Jusqu’où faut-il sanctionner la Russie ?

Les présidents américain et français ainsi que la chancelière Merkel ont exprimé leur solidarité à la première ministre Theresa May hier dans une déclaration conjointe. Une solidarité qui reste à prouver à travers des sanctions. Mais jusqu’où ne pas aller trop loin ? 

À chaque fois qu’on discute de sanctions, que ce soit aux États-Unis ou en Europe vis-à-vis de régimes jugés agressifs ou qui violent le droit international, se pose une double question : les sanctions sont-elles efficaces et les représailles qu’elles déclenchent ne risquent-elles pas d’être plus chères à payer. Avec la Russie, les sanctions adoptées depuis l’invasion de la Crimée et qui n’ont pas été allégées depuis 4 ans, n’ont pas eu d’impact majeur sur l’économie russe. Certes, elles ont contribué à désorganiser le circuit des opérations financières liées au secteur de l’énergie ou des transports. Certes, elles ont ciblé des proches de Vladimir Poutine, des dizaines d'individus dont les fonds à l’étranger sont gelés et qui sont interdits de séjour en Europe ou aux États-Unis. Mais la récession qu’a connue la Russie pendant deux ans est davantage due à la chute des prix du pétrole qu’à la punition infligée. Deuxièmement, ces sanctions, en tout cas au niveau européen, n’ont pas visé le gaz russe en tant que tel. Parce que nombre de pays de l’Union, à commencer par l’Allemagne, en sont largement dépendants. Et tant qu’une véritable politique de diversification énergétique n’aura pas été entreprise au niveau européen, le gaz russe et les projets de gazoducs russes vers l’Europe pourront continuer à maintenir à flot les recettes de l’État russe.

Autrement dit, il faudrait relever le niveau des sanctions ?

C’est exactement ce qu’ont plaidé, aux États-Unis en l’occurrence, les services de renseignement et du Trésor américain. Hier, leurs responsables, notamment le patron de la fameuse NSA,  ont estimé que les sanctions prises par Donald Trump pour punir la Russie de son implication dans l’élection présidentielle américaine, était trop faibles et trop tardives. Or l’ancien conseiller de Barack Obama pour les affaires européennes, Phil Gordon, me disait hier que plus on tarde et moins on met la barre suffisamment haut, plus la Russie considère cela comme de la faiblesse et se sent encouragée à persévérer dans ses activités d’ingérence et de déstabilisation. Autrement dit, si l’on sanctionne, il faut savoir endurer les sacrifices que cela occasionne dans les représailles russes sur nos propres économies.

Dans le même temps, on imagine que placer la barre trop haut peut avoir des conséquences incontrôlables ?

Tout à fait, et c’est là que l’on touche aux limites des grands principes, de la morale et du bras de fer. La Russie n’est pas l’Iran ou la Corée du Nord. Comme la Chine, elle siège au Conseil de sécurité avec droit de véto et se déploie en force depuis des années au point d’être devenue juge et partie, que ce soit sur l’Ukraine ou la Syrie où rien ne se fera sans elle.