Les principaux responsables libyens sont reçus par Emmanuel Macron afin de tenter d'ouvrir la voie à des élections dans leur pays, tombé dans le chaos depuis 2011.
On a l'impression que la géopolitique et la diplomatie sont parfois déconnectées de la réalité que la majorité des gens vivent au quotidien. Et pourtant, ce qui se passe mardi à l'Elysée, ce sommet entre les grands chefs des factions libyennes, devrait tous nous concerner. Prenez Mamoudou Gassama, devenu un héros en quelques heures. D'où vient-il ? Du Mali. Par où est-il passé pour fuir la misère dans son pays? Par la Libye. Par où a-t-il transité avant de débarquer à Montreuil en Seine-Saint-Denis ? Par l'Italie. Pourquoi la crise politique que connaissent en ce moment les Italiens atteint son paroxysme ? Parce qu'ils sont nombreux à avoir cru qu'il suffisait de voter pour le Mouvement 5 étoiles ou la Ligue du Nord pour se débarrasser des centaines de milliers de migrants échoués sur les côtes de la péninsule depuis cinq ans.
Réunifier un pays éclaté. Or, la réponse n'est pas dans une politique qui s'en tiendrait uniquement aux expulsions de migrants. Pour les migrants économiques, en provenance d'Afrique, la réponse est surtout en Libye, là où ils se font odieusement exploiter avant de risquer leur vie en Méditerranée. Il faut stabiliser ce pays, obtenir des factions rivales qu'elles soient en compétition pour le pouvoir sans se faire le guerre, et que le vainqueur de ce scrutin, légitimé par les urnes, travaille avec son opposition à la réunification des institutions : l'armée, la banque centrale ou encore les compagnies de pétrole. Parallèlement, il faut que ceux qui signeront la feuille de route de l'Elysée, entourés de leurs parrains régionaux, joignent leur force contre Daech et les réseaux des trafics en tout genre.
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Laisser le temps au temps. Mais ce ne sera pas suffisant, surtout si notre diplomatie n'est perçue que comme un moyen d'obtenir la réduction des flux migratoires. C'est la raison pour laquelle, en Italie comme en France, et au niveau européen également, une politique d'aide au développement digne de ce nom doit accompagner ce processus et fasse comprendre aux électeurs que ce travail prend du temps, le temps d'une génération peut-être. Si Mamoudou Gassama est un héros, nos responsables politiques, eux, ne sont pas dotés de pouvoirs extraordinaires, il leur faut juste du courage, les moyens et du temps.