"Le Conseil Constitutionnel a pris une décision de droit, mais en toute subjectivité" dénonce Henri Guaino.
Les principales déclarations de Henri Guaino, ancien conseiller spécial de Nicolas Sarkozy à l’Élysée:
Les comptes de Nicolas Sarkozy rejetés. Décision de droit ou décision politique ?
"Le Conseil Constitutionnel a pris une décision de droit mais en toute subjectivité ! La loi est mal faite ! Je pense que tous ceux qui ont à prendre des décisions juridictionnelles doivent absolument les prendre avec retenue : je pense que le Conseil Constitutionnel n'a pas pris une décision avec assez de retenue, ni sans en apprécier toutes les conséquences..."
A t-il confirmé son indépendance ou s'est-il discrédité ?
"Je ne crois pas qu'il ait renforcé son crédit, je crois qu'il a porté un mauvais coup à la démocratie, voilà."
Jean-Louis Debré, président UMP du Conseil Constitutionnel : est-il partial même anti Sarkozy ou anti UMP, ou subit-il l'influence même indirecte de François Hollande ?
"Non, moi je n'ai pas d'éléments pour porter ce genre d'accusations, et je ne les porterai pas. Je constate simplement que c'est une décision rendue en toute subjectivité. On a dépassé de 466.000 euros le plafond des comptes de campagne : dans le meeting de Villepinte, le Conseil Constitutionnel après la Commission des comptes de campagne, a dit que la répartition des dépenses entre l'UMP qui faisait un Conseil National le matin et le candidat un meeting l'après-midi, ne devait pas être de 50-50 mais de 80-20. Si on avait fait 70-30... Mais il n'y a rien ! Aucune loi !"
"Ces clés répartitions ne sont fixées nulle part, elles sont à l'appréciation du juge ! Si on avait fait 70-30, on aurait gagné 300.000 euros ! Et si on n'avait pas intégré dans les comptes de campagne le discours de Toulon... Ça, je sais de quoi je parle, je l'ai écrit ! Le discours de Toulon, c'est très intéressant parce que ça a des conséquences dramatiques ! Le Conseil Constitutionnel dit : ça ne faisait pas partie de l'exercice normal de la fonction présidentielle. Ce n'est pas vrai ! Nous étions en pleine crise de l'euro, sur le même format que le discours de Toulon de 2008 sur la crise des subprimes ! Ce n'est pas un discours de campagne, il n'y a pas un logo de campagne : c'est un discours de Président ! A un moment de crise ! Si vous le sortez des comptes et si vous passez d'une clé de répartition sur Villepinte de 80 à 70, vous êtes dans les clous ! C'est parfaitement subjectif !"
On vous reproche à vous 17.752 euros pour des réunions électorales...
"On ne me reproche rien du tout ! On reproche à ceux qui ont fait les comptes de campagne de ne pas les avoir mis dans les comptes, ce n'est pas la même chose..."
C'est la première fois que 460.000 euros vont coûter 11 millions...
"C'est cher, hein ? C'est cher mais les conséquences sont terribles ! Imaginez que Nicolas Sarkozy ait été élu : on n'aurait pas changé l'élection présidentielle, on aurait changé le curseur pour être juste dans les clous ! C'est la vieille histoire de Brennus : le chef gaulois qui assiège Rome, on négocie avec les gaulois une rançon pour libérer la ville, il arrive devant l'épée où l'on pèse l'or, il met son épée et dit : "Malheur aux vaincus" ! La démocratie ne peut pas continuer à fonctionner de cette façon-là..."
Il y a un lien entre certaines affaires judiciaires, la décision du Conseil Constitutionnel ?
"Moi j'observe un acharnement sans précédent contre un président sortant qui pourrait jouer un rôle dans l'avenir ! Sans précédent ! Je ne fais pas de théorie du complot, je ne sais pas ce qu'il y a derrière, je l'observe, tous les Français peuvent l'observer, et chacun jugera en conscience de la situation..."
François Fillon demande que soit respectée la décision du Conseil... Comment vous l'interprétez, cette phrase ?
"D'abord il faut en prendre acte, puisqu'il n'y a pas de recours... Si ça veut dire qu'on doit se passer de tout commentaire, je ne suis évidemment pas d'accord"
Est-ce pour lui, pour autant, une bonne nouvelle ?
"Je pense que c'est une mauvaise nouvelle pour tout le monde, que ceux qui s'imaginent que c'est une bonne nouvelle pour eux ont tort ! Je crois que le cynisme en politique a ses limites. Ceux qui pensent qu'ils auront moins de candidats, moins d'opposants, moins de rivaux à cause de cette affaire, se trompent ! Si jamais Nicolas Sarkozy ne peut pas se présenter, si jamais Jean-François Copé est exclu du jeu, qu'ils se rassurent : ils auront des candidats en face d'eux tout à fait déterminés !"
Moi moi moi, Henri Guaino ?
"Je n'en dirai pas plus ce matin ! Ils auront des candidats tout à fait déterminés, ils auraient tort de se réjouir des malheurs de la démocratie !"
Le candidat-président a peut-être confondu les caisses de l'Etat et de son parti ?
"Non. Le seul sujet dans cette affaire, c'est celui du discours de Toulon... Il faisait partie de l'exercice des fonctions présidentielles..."
A propos de la une de Libération "Sarkozy ruine l'UMP" :
"Oui, bah... C'est un journal militant !"
A propos de la une de Valeurs actuelles, "La chasse à l'homme", un hebdomadaire militant ?
"La chasse à l'homme, ça résume ce que pensent sans doute un certain nombre de Français ! Comment voulez-vous appeler ça autrement qu'une chasse à l'homme ?"
Nicolas Sarkozy a t-il pris la bonne décision en quittant aussi tôt le Conseil Constitutionnel ?
"Il se met en congé, en retrait, appelez ça comme vous voulez. Non, ce n'est pas une impulsion ! Quand vous êtes membre du Conseil constitutionnel, vous n'avez pas la liberté de parole ! Quand il se met en congé, il reprend sa liberté de parole. Je pense qu'il a suffisamment subi d'avanies, d'injures, d'attaques depuis des mois pour qu'il ait à un moment donné envie de s'expliquer devant les Français..."
Va t-il tomber dans le piège du retour politique précipité ? Pour vous, est-ce la meilleure opportunité ?
"Non, je ne pense que ce n'est une opportunité pour personne, il serait dommage de revenir en politique là-dessus. En revanche, il ne peut rester inerte devant les attaques, les accusations que l'on porte contre lui. A un moment, oui, il a envie de se défendre... C'est au-delà de la politique !"
L'UMP lance une souscription nationale... Vous allez tous donner ?
"Bah oui, je ne vois pas comment on peut faire autrement. L'UMP n'a pas les 11 millions, Nicolas Sarkozy, à ma connaissance, non plus... Tous les Français qui voudront préserver la démocratie, qu'il y ait toujours une opposition dans ce pays... Qu'ils soient d'ailleurs sympathisants de l'UMP ou pas ! Ceux qui croient à la démocratie et à la République donneront, les uns un peu, les autres un peu plus... Pour que l'opposition survive !"
Les ténors PS absents dès que l'on évoque Delphine Batho. Ses propos reflètent-ils une fragilité ou une maturité politique chez cette jeune femme ?
"Je ne sais pas. Je pense qu'elle aurait dû démissionner avant de faire ces déclarations. C'est vrai qu'un ministre, quand il n'est pas d'accord, d'abord il s'en va et après il dit pourquoi il est parti... Son exposé hier était très clair, assez dur, montre comment fonctionne le gouvernement. Nous avons un gouvernement qui manque d'autorité et qui fait donc acte d'autoritarisme d'une part. Et d'autre part, des ministres qui se pensent chacun les porte-paroles de la clientèle de leurs ministères. Ca ne peut pas marcher ! C'est l'esprit de ce gouvernement ! Un esprit de la IVème République ! On sert des clientèles, voilà le résultat..."
Delphine Batho a dénoncé les lobbys et certaines puissances économiques... Pensez-vous que c'est aussi vrai que ça ?
"Je pense qu'il y a des débats, encore une fois, chacun dans le gouvernement sert le lobby et ses clientèles ! Il y a forcément des conflits internes très graves... Dans une démocratie, chacun défend ses intérêts, le problème est de savoir si le gouvernement est la caisse de résonnance de tous les lobbys, toutes les communautés, de tous les groupes d'intérêts ou s'il défend l'intérêt général..."
A propos de l'Egypte : coup d'état ou révolution démocratique ?
"Une révolution n'est jamais démocratique par définition... C'est un coup d'état au sens strict, et en même temps y'a t-il une autre solution ? Mais ce coup d'état, ce n'est pas l'armée qui l’a fait, ce sont les millions et millions d'égyptiens descendus dans la rue ! Maintenant, le problème est de savoir si l'Egypte va sombrer dans le chaos ou pas... Mais il n'y avait pas d'autre solution que celle utilisée par l'armée, une des seules institutions qui avait les moyens d'essayer de créer les conditions d'une transition dans l'ordre..."