Raffarin : "le virage à droite du président est bien venu, mais..."

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SAISON 2013 - 2014, modifié à

L'ancien Premier ministre estime que les vœux du président sont "une inversion par rapport au discours du Bourget".

Jean-Pierre Raffarin, sénateur de la Vienne, et ancien Premier ministre

Ses principales déclarations :

 

Qu'est-ce qui arrive à l'opposition ? Dépouillée par François Hollande et sans voix...

"Ça se saurait si un discours de François Hollande avait beaucoup d'effet ! On le sait habile sur la parole, son problème, c'est plus les actes ! C'est vrai qu'il nous a fait des vœux relativement à droite : on était tous d'accord ! Il y a trop d'impôts, oui ! Baisser les charges, oui ! On ne fait pas assez pour l'emploi, oui ! Qu'il le fasse : chiche, M. le Président !"

S'il passe aux actes, vous le soutenez ?

"Bien évidemment s'il allège les charges ! Mais pourquoi pourrait-il le faire aujourd'hui alors qu'il n'a pas pu le faire pendant deux ans ? Pour une raison simple : il n'a pas la majorité pour cela ! Il fait un discours social-libéral, tant mieux ! Chiche ! Mais sa majorité, avec les écolos, les communistes, avec ceux qui sont rassemblés qui au Sénat ne votent jamais ses textes... Il n'a pas la majorité de ses propos !"

L'opposition est muette...

"Laissez-les revenir de vacances ! Tout le monde dit que la  classe politique serait muette parce qu'on ne s'est pas encore exprimé entre le 1er et le 5 janvier  ! Le Parlement commence à se réunir, vous allez entendre les uns et les autres : vous verrez que le Président n'a pas la majorité de sa parole !"

La droite reste coite... Comme si François Hollande lui avait volé son programme...

"On se dit simplement : pourquoi a-t-on perdu deux ans ? Que nous dit-il dans son discours ? Une chose très importante ! On va transférer le financement du système social de l'emploi, car ça pénalise l'emploi, vers la consommation ! On revient à la TVA sociale anti-délocalisation installée par Nicolas Sarkozy et supprimée par François Hollande ! Enfin de la lucidité mais on a perdu deux ans !"

 

Comme d'autres avant lui, il corrige...

"Il annonce qu'il va corriger, il promet la correction !"

S'il le fait, vous serez coincés...

"Mais pourquoi voulez-vous que l'on soit coincés s'il fait les choses bien ? Je le dis solennellement : nous ne sommes pas dans une situation où l'on peut se permettre de souhaiter l'échec du Président. On ne se rend pas compte de la situation de la France : nos PME nous envoient des SOS d'alerte en permanence, bâtiment, agriculture, agroalimentaire, artisanat, ça va très mal. Personne ne peut souhaiter l'échec de la France. Le Président veut alléger les charges ? Chiche ! Moi je suis prêt à voter un allègement de charge : il faut aller dans ce sens-là, social et libéral, nous sommes pour cette orientation. Mais qu'il passe à l'acte ! Qu'il nous montre qu'il a la majorité de ses paroles !"

 

Est-ce un tournant, un approfondissement ? Une conversion ?

"C'est en tout cas une inversion par rapport au discours du Bourget ! Une inversion, à défaut de courbe, au moins de discours ! Tant mieux s'il y a cette inversion ! L'important, pour nous, c'est le passage à l'acte. Allégeons les charges ! La pression fiscale est insupportable, les Français sont en colère ! S'il veut alléger les charges qui pèsent sur les entreprises et les Français, chiche !"

Et s'il pratique par ordonnance ?

"Pourquoi pas ? Quand ça va dans la bonne direction, je ne suis pas du tout hostile à cela ! Notamment si c'est pour coincer sa majorité... Le virage à droite du Président est bienvenu ! Il est vraiment bienvenu mais nous n'y croyons pas !"

Pierre-Olivier Sur disait hier sur Europe 1 que la loi Gayssot pouvait envoyer Dieudonné en prison avec perte des droits civiques. Vous êtes d'accord ?

"Je suis d'accord avec ces propos. Ce que dit Dieudonné est insupportable pour la mémoire de tous ceux qui ont été victimes de la Shoah. Je lisais hier soir un livre sur les enfants d'Izieu. Je pense à tout ce que ce pays a pu souffrir, et au-delà. Laisser des propos antisémites se répandre et organiser des réunions publiques pour les valoriser, c'est inacceptable dans la République Française. Dans cette affaire, je partage l'objectif de Manuel Valls et des autorités de notre pays, d'Alain Juppé : il faut interdire ces spectacles. Mais je le dis : je trouve que le gouvernement dans cette affaire est trop bavard et pas assez ferme. Pourquoi ces peines ne sont-elles pas exécutées ? Pourquoi le Fisc qui débusque tant de manœuvres en France ne débusque rien sur le dossier de Dieudonné ? Je demande au gouvernement d'être plus ferme et moins bavard. Je vois que l'on fait beaucoup de pub à M. Dieudonné : naturellement, pendant les Fêtes, on n'a pas parlé des voitures volées, on ne parle pas de la montée de l'emploi. M. Dieudonné fait l'actualité : c'est à nouveau de la diversion."

Appelez-vous l'UMP à manifester aux côtés des Klarsfeld ?

"Je ne suis pas un fanatique de la manifestation. Il faut soutenir tous ceux qui se battent pour la mémoire des victimes de la Shoah."

Pourquoi droite et centre ne se rassemblent pour profiter de l'impopularité de l'exécutif ?

"Nous sommes en construction, nous avons été battus ! Après une défaite, il faut se reconstruire. On se reconstruit notamment à partir de la prochaine échéance : après deux ans sans élections, c'est avec les municipales que nous avons notre rendez-vous de vérité avec les Français. Je crois que ces élections seront très positives pour l'UMP et le Centre. Il faut continuer notre reconstruction, nous allons annoncer le 25 janvier notre projet. Je pense qu'il y a dedans des orientations fortes. L'alternance n'est pas pour demain matin : nous devons la préparer, et d'abord gagner les municipales. Tous ceux qui ont du mécontentement à exprimer ont une belle occasion de dire au gouvernement ce qu'ils pensent de sa politique, aux municipales."

Paris va rester à gauche ?

"J'espère que NKM va gagner ! Tout ce qu'on dit sur elle est souvent désagréable : elle mérite beaucoup mieux que tous ceux qui la critiquent. Elle est capable de faire beaucoup plus qu'un grand nombre de ses détracteurs. C'est une fille de très grande qualité, j'ai confiance en elle ! Je la connais. Bien sûr je suis disponible pour l'aider ! Etre à un point de la sortante au premier tour, c'est très important ! Malgré toutes ces attaques et toutes ces dissidences personnelles organisées contre son projet collectif, elle est à un point d'être devant !"

A t-elle raison de ne pas vouloir céder aux dissidents ?

"Je pense qu'elle doit mener sa campagne. A partir du moment où nous l'avons choisie, nous devons respecter ses options. Je lui recommande de rester la main tendue le plus possible avec l'ensemble de tous ses partenaires.  Surtout qu'elle ne s'occupe pas des critiques : qu'elle parle aux parisiens, pas aux médias ou à ses détracteurs."

A Marseille ?

"Jean-Claude Gaudin gagne ! Je suis très confiant pour Marseille : nous avons des informations très positives, secteur par secteur."

 

A propos de Goodyear. Est-ce normal de la part des syndicats, CGT en tête, de retenir des dirigeants ? Peut-on négocier du social dans ces conditions ?

"Bien sûr que non ! Je condamne toute forme de violence. Nous sommes très favorables à un dialogue social ; dans notre pays, il est insuffisamment organisé. Je pense que les syndicats doivent réfléchir sur leurs méthodes d'action et notamment sur la manière dont on condamne et dont ils doivent condamner la violence."

Le gouvernement ne fait rien ? Vous ne recommandez rien non plus...

"Comment ça je ne recommande rien ? Donnez-moi dix minutes ! Il faut de la fermeté, et faire respecter l'Etat de droit ! Ce qu'on demande au gouvernement : faire respecter l'Etat de droit ! Quand une église est attaquée, profanée, le gouvernement doit faire respecter l'Etat de droit : c'est vrai aussi dans l'entreprise ! L'Etat de droit, c'est ça la République !"