"Je participe aux Jeux Mondiaux des Transplantés pour dire merci à mon donneur", raconte Sabine Rodrigues.
Sabine Rodrigues, atteinte de la mucoviscidose, elle a été greffée des poumons en 2007. Elle participe aux Jeux Mondiaux d’hiver des Transplantés en Haute-Savoie
A 39 ans, vous êtes atteinte de la mucoviscidose. Greffe de poumon en 2007...
"Le téléphone a sonné à 1h32 du matin. Quand on est en attente de greffe et que le téléphone sonne en pleine nuit, vous savez qui est au bout du téléphone ! C'est un coordinateur qui vous dit qu'un greffon vous attend quelque part, qu'il faut faire vite, partir. Il faut se décider en une fraction de seconde : on ne réfléchit pas, on dit oui, sans préparer les valises."
"A mon réveil, j'ai pensé à cette personne merveilleuse qui m'a fait ce cadeau de vie. Si je me bats, ce cadeau me permet de revoir ma famille, mes enfants, les voir grandir. Vivre tout simplement, c'était impossible. Cette personne m'a sauvé la vie ; elle était comptée en mois. A un moment, il faut se résoudre à signer les papiers pour se mettre en liste d'attente et patienter en espérant que ça arrive vite car on voit son état se dégrader. La vie de tous les jours devient difficile : se lever le matin est compliqué, se laver demande des heures et un accompagnement constant. On ne peut plus cuisiner par exemple, il y a l'oxygène, la machine pour respirer... C'est ne plus participer à la vie familiale, être spectateur, plus acteur : c'est très difficile quand on est maman."
"Je ne suis pas guérie. La maladie restera en moi et d'autres organes sont atteints mais, au niveau respiratoire, je suis presque sauvée. On n'est jamais à l'abri d'un accident, il peut y avoir un rejet, c'est toujours possible."
Vous skiez, vous participez à ces jeux mondiaux d'hiver... Quel est le sens ?
"C'est une question de souvenir, de reconnaissance, envers mon donneur. Lui dire merci, regarde ce que je peux faire grâce à toi. Et faire passer le message que le don d'organe est une question vitale pour certaines personnes ; il faut nous voir vivre pour comprendre que c'est un geste merveilleux, redonner la vie aux gens. Oui ça se fait dans des moments difficiles, on est face à une personne qu'on va perdre, mais qui va en sauver tellement d'autres ! Le don d'organes, c'est très important, il faut y penser : y penser avant que ce soit compliqué, dans des moments tragiques... En parler autour de soi."
"Il faut en parler quand ça va bien pour être libre et ne pas se poser de questions à un moment donné difficile de la vie. Il faut en parler : qu'on soit pour ou contre. Le oui n'est pas obligatoire..."
"Je n'ai rien pu savoir sur mon donneur. Le don est gratuit et anonyme. Je ne sais pas où il vivait, comment il nous a quittés... Remercier la famille, je l'ai fait par le biais de l'agence de biomédecine où, sous couvert d'anonymat, on peut adresser un courrier, qui sera classé dans le dossier. Si la famille a souhaité avoir des nouvelles du greffé, elle peut avoir accès au dossier mais il n'y a aucune information sur moi. Mais c'était essentiel pour moi de le faire."
Le sujet reste tabou. Sur 100 prélèvements possibles, 30 ne sont pas faits à cause du refus des familles. Que dites-vous à ces familles ?
"Il faut respecter la volonté du défunt. Parfois la personne était pour, la famille est contre, et le contre l'emporte malheureusement. Malheureusement, on est face à une mort mais elle peut apporter sept vies ! On peut greffer jusqu'à 7 personnes avec un défunt. Et se mettre à la place de celui qui attend un organe : vous aimeriez que l'on vous donne cette chance. A moins d'être dans des convictions terribles, on peut tous vivre..."
Comment ça marche, faire savoir sa volonté ? En parler, porter une carte ou simplement le dire. Si je le dis, là, sur Europe 1...
"Oui, votre volonté a été entendue, écoutée, on connait votre position ! C'est plus simple pour les familles que de se demander ce qu'aurait souhaité la personne... Là, c'est dit, c'est clair : on sait que Thomas Sotto est pour le don d'organes !"
Votre épreuve du jour ?
"Raquette et ski de fond ! L'objectif ? Oh, non, pas la médaille ! C'est prendre la ligne de départ, la franchir et remercier la vie, mon donneur et rencontrer des gens formidables."