Catherine Nay explique les raisons de la récente montée de la côte de popularité du Président dans les sondages.
W.B. : François Hollande revient dans la course. Au lendemain des attentats du 13 décembre sa cote a bondi de 22 points pour atteindre 50 % d'opinions positives. Un retournement. A ce contexte porteur, s'ajoutent le succès de la COP 21, une résistance de la gauche aux élections régionales et des Républicains ravagés par les divisions. Le président peut-il capitaliser sur sa stature recouvrée ? Est-ce durable ? Vous l'avez rencontré.
D'abord, vous etes face à un homme affable, rieur, imperméable à l'anxiété. C'est sa nature. Par contagion, il vous convainc qu'on a rien inventé de mieux que la vie. Il se réjouit du succès de la COP 21. C'est lui qui a voulu qu'elle se déroule à Paris. Fabius triomphe mais au départ il était réticent lui. L'accord de 195 pays, tous présents, c'était une gajure. Et François Hollande a eu son rôle en coulisse : il a appliqué à la diplomatie les recettes du congrès du PS, comme quoi il n'a pas été inutile d'avoir été premier secrétaire pendant 10 ans. Passer des nuits à téléphoner aux récalcitrants, en l'occurence "Allo Raoul - Raoul Castro vous l'avez compris - C'est François. Dit donc, on a annulé une partie de ta dette, téléphone à ton ami Daniel Ortega du Nicaragua qu'il doit signer"... Le président raconte que Ben Khimoun le secrétaire général de l'ONU a lui aussi appelé Ortega. Il est tombé sur sa femme. "Madame, il faut dire à votre mari de dire oui". Mais personnellement François Hollande a aussi appelé Barack Obama, le président turc Erdogan. La COP 21 est un succès, mais les esprits étaient mûrs, le réchauffement climatique parle à la planète entière. Il ne va pas se passer grand chose pendant 5 ans...
W.B. : La gauche est à son plus bas historique. Comment le président compte t-il rebondir ?
La gauche est totalement rayée de la carte dans certaines régions. Mais la droite n'apparait pas comme une alternative automatique à la faillite du pouvoir. François Hollande est convaincu que les divisions chez les républicains vont agir comme un venin et que lui, au contraire, peut conforter sa stature. En ces périodes troublées, les français ont besoin d'un président. Il sera là, comprenez en 2017, même si 56% des sympathisants de gauche rêveraient voir émerger quelqu'un d'autre. Mais lui analyse au contraire qu'un président en exercice a plus de chance de se faire réélire. Et puis il n'a pas de rival : exit Aubry, out Montebourg, et l'aile gauche n'a pas de héros crédibles. Et puis le deuxième tour des régionales a démontré que la gauche est capable de se retrouver. La main tendue de Cécile Duflot l'incite à espérer qu'il n'y aura pas de candidats vert.
W.B. : Mais pour l'emporter, la gauche ne suffit pas.
François Hollande est un commentateur politique. Pour analyser les rapports de force, évaluer les situations, on le sent à son affaire. Son analyse est claire : dans un pays qui centre dans le tripartisme la priorité c'est de rassembler à gauche et de grignoter à droite et au centre, au delà du terrain laissé vacant par un Nicolas Sarkozy toujours fidèle à sa ligne droitière. Il juge qu'il a eu raison de faire alliance avec l'UDI mais il voit bien que l'électorat centriste a boudé. Or, en 2017, le combat se jouera entre deux blocs : l'un républicain, l'autre réactionnaire. Voilà pourquoi Manuel Valls saisit la main tendue par Jean Piere Raffarin, partisan d'un pacte républicain contre le chômage. François Fillon a annoncé qu'il allait faire des propositions à François Hollande sur le temps de travail et l'allègement des charges. Tope la. Et puis on a vu François Hollande dans le Pas de Calais aux côtés de Xavier Bertrand pour parler de concorde, deux hommes tout sourire.
W.B. : Cette concorde nationale peut elle déboucher sur une recomposition politique ? On voit bien que François Hollande en rêve et Manuel Valls itou...
La recomposition dépendra de l'issue de la primaire à droite. Si elle devait avoir lieu, elle n'interviendra qu'entre les deux tours de la présidentielle. Mais d'ici là, beaucoup d'eau va couler sous les ponts. Pour l'heure, les sondages sont assez contradictoires : d'un côté François Hollande, c'est vrai, s'est refait une santé. Mais de l'autre on voit qu'il aurait du mal à se qualifier pour le deuxième tour quelque soit le candidat de la droite. Les Français ne lui pardonnent pas son échec sur le plan économique. La situation est catastrophique, notamment sur le front du chômage. Et s'il n'obtient aucun résultat significatif d'ici 2017, ce sera adieu vaches, cochons, couvées.