Ce samedi, Catherine Nay décrypte la présence de Nicolas Sarkozy et de François Hollande dans l'espace médiatique et politique.
Bonjour Catherine,
Bonjour Bernard, bonjour à tous.
L'hebdomadaire Le Point consacre 15 pages à Nicolas Sarkozy. Un long entretien où il livre ses analyses politiques et sa vision du monde. Et il ne se passe pas une semaine sans que François Hollande nous donne de ses nouvelles. Avec son livre, il a fait un tour de France, il continue. Les ex sont toujours là ! Une spécialité française ?
Absolument. Un jour, on avait demandé à Valéry Giscard d'Estaing à quoi sert un ancien Président de la République ? Il avait répondu : "à rien". Réponse dictée par la mélancolie. Car ce n'était pas faute d'avoir tenté de revenir. Il était même reparti de la base : Conseil Général, Régional, député européen. En 1988, il aurait voulu que François Mitterrand, réélu, le nomme à Matignon. Incroyable mais vrai !
Quand on a consacré sa vie à la politique, on n'en sort jamais ! Il faut lire l'interview de Nicolas Sarkozy, plume à la main, où il analyse les nouveaux rapports de force dans le monde ; l'Europe en panne, les solutions pour la faire repartir ; la crise migratoire qui s'annonce. "Malheureusement, nous n'avons encore rien vu", dit-il. Ce sont les réflexions d'un homme qui voyage sans cesse à l'étranger, rencontre énormément de monde, et pas que les dirigeants de la planète. Il est sûrement, aujourd'hui, le politique qui a accumulé le plus de connaissances macro-économiques et géopolitiques. D'où les réactions dans son camp, cette semaine, toutes laudatives et admiratives.
Cette sortie médiatique de Nicolas Sarkozy met surtout en lumière les difficultés de Laurent Wauquiez à s'imposer comme chef du parti Républicain.
Oui, Nicolas Sarkozy est plébiscité par 77% des sympathisants chez les Républicains, très loin devant Laurent Wauquiez. "Si les primaires avaient lieu aujourd'hui, Sarkozy arriverait en tête", dit Luc Ferry. Mais la question est plutôt : que se passera-t-il si les élections européennes sont un flop pour les Républicains ? Qu'on ne compte pas sur lui. Nicolas Sarkozy a tourné la page. "Je n'ai pas besoin du pouvoir pour vivre", dit-il. "J'ai toujours su que c'était une parenthèse". Et il se dit trop occupé pour être en manque, avec un emploi du temps très éclectique. Mais il ne boude pas son plaisir d'être autant plébiscité.
Il reçoit beaucoup, rue de Miromesnil. Il est devenu, pour son camp, une référence, un repère, une boussole. Ce, d'autant plus qu'il a abandonné les petites phrases assassines. Il s'est converti à la bienveillance, ou presque. "Le pouvoir est dangereux, un peu d'expérience ne nuit pas", dit-il à l'adresse d'Emmanuel Macron. "Ce qui compte, dit-il encore, ce sont la vision, le leadership et l'énergie que l'on est prêt à mettre au service d'un pays." Et là, il dessine en creux un autoportrait, comme pour mieux souligner qu'hélas, le moule est aujourd'hui cassé.
Et François Hollande ?
Il était invité, jeudi, au Festival politikos à Rennes. L'occasion pour lui de tacler, entre les lignes, son successeur. Lorsqu'il évoque le besoin d'une humanisation de la politique, c'est lui qu'il vise. Voilà des mois qu'il dénonce sa méthode méprisante, son narcissisme, ses décisions injustes. Il le qualifie de "hautain". François Hollande s'est fait avoir comme un bleu. Il n'a pas jeté la rancune à la rivière. Dernièrement, à Cherbourg, c'est en jubilant presque qu'il énonçait : "Si le pouvoir échoue, et c'est possible par les décisions qu'il prend, par l'absence de résultat, qui peut prendre sa place, qui sera là ?"
Et vous croyez que François Hollande songe à lui ?
Le matin en se rasant, sûrement un peu. Au parti socialiste, ou ce qu'il en reste, on s'apprête à ouvrir l'épineux dossier de son quinquennat. Eh bien justement, pour l'ex-Président, qui l'a dit à Rennes, ce n'est pas sa faute à lui mais aux frondeurs s'il a renoncé à livrer bataille pour défendre son bilan. Un cas unique dans les annales (le sortant qui ne se représente pas). Alors un retour, pour refaire autrement ? "Mais je ne suis jamais sorti de la politique", dit-il. Un propos qui révulse ses camarades, certes. Mais il y a aussi tous ces gens qui viennent l'applaudir, le fêter, l'encourager. Ça veut bien dire quelque chose, non ? Un rêve passe.