Ce samedi, Catherine Nay brosse décrypte le lancement de la consultation sur la réforme des retraites par Emmanuel Macron.
Bonjour Catherine,
Bonjour Bernard, bonjour à tous.
Emmanuel Macron a replongé dans l'arène. A Rodez, cette fois pour convaincre les Français du bien-fondé de sa réforme des retraites. L'un des chantiers les plus explosifs de son quinquennat.
Oui, le président a remis ça, avec toujours le même dispositif. Lui au centre de la lumière, parlant debout, sans tomber la veste cette fois, et toujours plein d'allant, pédagogue. Très conscient aussi que cette réforme suscite des peurs. Il voulait lever des malentendus. Dans cette salle, où l'on voyait beaucoup de seniors, il a dit : "Quand on est retraité, on n'est pas touché. Quand on est à 5 ans de la retraite, on n'est pas touché." La Loi cadre votée l'été prochain commencera à s'appliquer en 2025, mais la transition se fera sur 15 ans, dit-il. Soit 2040.
Il le sait, cette réforme décidera des conditions dans lesquelles le candidat Macron s'approchera de 2022.
Emmanuel Macron a été élu sur un diagnostic. La France n'avait que trop longtemps différé les thérapies de choc indispensables à sa bonne santé. Pendant la campagne, on lui avait vendu l'idée d'une réforme systémique pour les retraites. Le modèle suédois. Un régime universel, simple, juste, où tout euro cotisé donne les mêmes droits à tous. On calculerait le montant sur toute la durée de la carrière. Sur le papier, une conception hégélienne de la réforme parfaite. Traduction en France : les 42 régimes ne feraient plus qu'un. Plus juste, vraiment ? Des premiers calculs montrent que si 40% des salariés verraient leur retraite améliorée, 60% en revanche seraient perdants. Les cadres par exemple, dont le calcul du montant de leur retraite se ferait sur les 25 meilleures années de leur carrière. Et les enseignants, les fonctionnaires dont la retraite est calculée sur les 6 derniers mois de salaires ? Vous sentez la grogne dans l'air.
Sans compter tous ces régimes : avocats, médecins, kiné, Air France, qui ont défilé le 16 septembre, pour dire leur hostilité à la réforme.
Ils ont bâti un système sans rien demander à l'Etat, avec leurs cotisations, leur caisse, leur fonds de réserve, ça marche bien. Et l'on voudrait qu'ils apportent leur réserve au pot commun, au nom de la justice. En clair, payer pour les autres. Ils ne veulent, on les comprend.
C'est une réforme très difficile à faire.
C'est un tapis de bombes, parce que chacun a ses intérêts à défendre en fonction de son métier, de sa carrière, de son âge, de ses revenus, de sa santé... Cette réforme fait peur. Alors on voit bien que déjà Edouard Philippe lâche du lest. Il l'a annoncé, un état des lieux va être dressé. Et que pour rejoindre cette maison commune du système universel, chacun, dit-il, devra dessiner son propre chemin de convergence. Et tant que ce chemin ne sera pas tracé, le nouveau système ne lui sera pas appliqué, a-t-il dit. C'est ce qui s'appelle donner du temps au temps. Il l'a dit aussi : les droits acquis resteront acquis, la valeur du point sera déterminée par une autorité indépendante. Bref, on avance un pied sur l'accélérateur et l'autre sur le frein.
Peut-on craindre un embrasement social ?
C'est le rêve de la CGT et de FO qui mobilisent pour le 5 décembre. La RATP et la SNCF ont déjà déposé des préavis de grève reconductibles. Faire du 5 décembre un remake de 1995, où la France avait été bloquée pendant 3 semaines. Alain Juppé, qui avait voulu réformer les régimes spéciaux, avait reculé.