Lors de ses vœux à la presse mercredi, Emmanuel Macron a insisté sur les principes censés régir les relations entre pouvoir et médias.
Mercredi, Emmanuel Macron présentait ses vœux à la presse. Un discours dense de plus de 30 minutes, qui n'a pas été suivi par une séance de questions-réponses. Beaucoup de propositions à la clé et aussi, une leçon sur la saine distance nécessaire entre pouvoir et médias.
On l'a compris dès son arrivée à l'Elysée. Dans ses rapports avec la presse, Emmanuel Macron a voulu se distinguer de son prédécesseur, François Hollande, victime de sa trop grande proximité avec les médias. Il s'est grillé en abreuvant de ses confidences les deux journalistes du Monde, Gérard Davet et Fabrice Lhomme. Pendant des mois, il les a vus, reçus à l'Elysée, allant même dîner chez eux. Des moments intimes, où il leur a dévoilé des secrets d'Etat. Et alors qu'un président doit rester maître de ses propos, lui a accepté, sur l'injonction des auteurs, de ne pas relire le texte avant parution, ce qui demeure incroyable. On se souvient de Manuel Valls disant publiquement sa honte. Mais l'impact du livre a été tel que François Hollande a renoncé à se représenter. C'est vrai qu'il répondait aussi aux vœux de 80% des Français ! Mais François Hollande a toujours théorisé que le devoir d'un politique était d'orienter les journalistes, leur donner le bon angle, se vantant d'avoir inspiré des journalistes illustres. "Parfois même, une information bidon, ça fonctionne", disait-il comme le révélait le livre d'Antonin André et Karim Rissouli. Morale de l'histoire : qui croyait tenir, s'est fait prendre. Pour Emmanuel Macron, le modèle à ne pas suivre.
"Chacun doit vivre avec une distance légitime", a dit Emmanuel Macron.
"La saine distance entre pouvoir et médias", vieux refrain. Le journalisme, c'est à la fois le contact et la distance, question de dosage très difficile. Alors soit les journalistes sont accusés d'être trop complices, donc d'être des laquais du pouvoir, soit soupçonnés d'être des conspirateurs acharnés contre le régime en place. Emmanuel Macron préfère se tenir à distance. Pas de conciliabule dans les avions, pas d'aparté ni de connivence, pas de déjeuner avec les rédactions. Au départ, il avait même interdit à ses collaborateurs de l'Elysée de parler à la presse, entendait choisir les journalistes qui l'accompagneraient dans ses voyages. Les choses se sont un peu arrangées depuis, heureusement pour tout le monde.
Le président donne aussi des conseils.
Oui. Il a fustigé ces pratiques des journalistes qui, parfois jusqu'à l'obsession, cherchent à comprendre le contexte plus que le texte. Ce qui aboutirait, dit-il, à privilégier les propos d'antichambres, le détail au détriment de l'essentiel, à favoriser les propos tenus en off plutôt que les déclarations officielles. Mais disant cela, il montre une vision très autoritaire et peu libérale du métier. Il réinvente la Pravda. Privés de confidences, les journalistes deviendraient de simples communicants, passeurs de plats de son quinquennat. Ce qui révèle, pour le moins, une grande méfiance. "Savoir si je prépare mes vœux de nuit, de jour, assis ou debout, ça n'a aucun intérêt", moque-t-il. Objection votre honneur : même si l'intérêt est relatif, cela fait partie de la transparence, de la liberté du journalisme. Et le détail en dit quelquefois beaucoup plus qu'un commentaire autorisé !
Autre proposition : Emmanuel Macron règle ses comptes avec les Fake News.
Emmanuel Macron n'oublie rien, et surtout pas qu'avant le 1er tour de l'élection présidentielle, une de ces Fake News, c'est à dire ces fausses nouvelles, lui avait prêté un compte en banque aux Bahamas. Information reprise par les réseaux sociaux. Il avait alors demandé au CSA de veiller à ces attaques pirates qui risquaient de polluer la fin de sa campagne. Étaient dans son collimateur RT France et Sputnik France, des médias russes francophones financés par le Kremlin. D'ailleurs à peine installé à l'Elysée, recevant Vladimir Poutine à Versailles, Emmanuel Macron avait vertement répondu à la responsable russe de RT France qui l'interrogeait pour lui rappeler qu'elle avait fait partie de ces organes d'influence qui, à plusieurs reprises, avaient produit des contre vérités sur "ma campagne et ma personne", avait-il dit. A ses côtés, Vladimir Poutine était demeuré impassible, le regard fixe, vide presque, comme si cet échange ne le concernait pas. Mais enfin, ce qui devait être dit a été dit.
C'est dans ce contexte qu'il faut situer la volonté présidentielle d'un nouveau dispositif juridique pour protéger la vie démocratique des fausses nouvelles.
Ce serait une nouvelle loi qui ne s'appliquerait qu'en période électorale, a-t-il précisé. Qui exigera la transparence des contenus diffusés sur le web.