Muriel Pénicaud affirme que le nombre d’inspecteurs du travail ne baisse pas.
Vrai-Faux, Géraldine Woessner : l’Inquiétude des inspecteurs du travail.
C’est sur eux que va reposer, en partie, la réussite des politiques lancées par le gouvernement : lutte contre le travail illégal, égalité salariale. Les contrevenants seront traqués, promet-on. Mais traqués par qui ? Le budget de l’inspection du travail n’augmente pas, la ministre Muriel Pénicaud rassure.
"Les effectifs n'ont pas baissé ces dernières années, et ils sont au-dessus de la moyenne recommandée par l'Organisation Internationale du Travail. J’ai les chiffres, je les montrerai".
Le nombre d’inspecteurs du travail ne baisse pas. Vrai ou faux ?
Il est impossible de répondre clairement, car les effectifs d'aujourd’hui, en réalité, la ministre du Travail ne les a pas : personne au ministère n'a pu nous les transmettre. Seuls les chiffres de 2016, qui vont être transmis bientôt à l’OIT, sont connus : 2.251 inspecteurs, exactement, étaient sur le terrain cette année-là, au contact des entreprises. C'est exactement le même nombre qu’en 2010, à six agents près.
Le problème, c'est qu'on parle de postes budgétaires. Or ces dernières années, on a beaucoup fait jouer la promotion interne, et 125 agents, toute l'année, sont en formation, et non sur le terrain. D'autres postes ne sont pas pourvus (46 en Île-de-France, par exemple.) Ce qui explique pourquoi les syndicats affirment que le nombre d’inspecteurs du travail est en baisse : ils ont raison. D’autant plus que des postes vont être supprimés cette année, le ministère l’admet. Mais où, combien ? Il faudra attendre deux ans que les informations remontent, nous dit-on, pour en avoir le cœur net.
Mais on reste dans la moyenne de ce que recommande l’Organisation Internationale du Travail ?
Oui, on reste en-dessous de ce seuil d'1 agent pour 10 000 salariés que recommande l'organisation, même si c’est très tendu dans certains territoires (les Pays de la Loire, l’île de France). Mais il faut comprendre que ce seuil n’est qu’indicatif : on l'a fixé en 2006, c'est le même pour tous les pays. Or depuis, le monde du travail a changé, et les inspecteurs passent beaucoup plus de temps sur un seul dossier qu'il y a 10 ans. Parce que les contrats courts ont explosé (il faut vérifier les motifs de recours aux CDD, il y en a 14 différents), que les horaires atypiques se développent. Le code du travail lui -même s’est alourdit, il compte plus de 11 000 articles, et les ordonnances récentes de réforme du travail vont encore compliquer la donne : parce que là où le code s’appliquait, il va falloir vérifier, maintenant, chaque accord d’entreprise. Tout cela à effectif constant depuis 2010… On conçoit que cela puisse coincer. Aujourd’hui, une entreprise n'a de chances de se faire contrôler qu'une fois tous les 10 ans, ça ne devrait pas changer.
Pourtant le gouvernement promet de multiplier les contrôles.
Oui : il veut augmenter d’un tiers les visites contre le travail illégal, booster les actions contre la discrimination, et quadrupler les contrôles sur l’égalité salariale. Les inspecteurs peuvent sans doute mieux s'organiser (la Cour des Comptes l’avait souligné en 2016), mais sans moyens supplémentaires, on ne peut pas espérer de miracles. Le gouvernement, d’ailleurs, semble en être conscient : les 7.000 "contrôles" promis sur l’égalité salariale (contre 1.700 aujourd’hui) devraient consister, pour les inspecteurs, à s’assurer par courrier qu’un accord d’entreprise a bien été signé sur le sujet, mais on ne prévoit pas d’aller vérifier, sur place, les bulletins de salaires.