Gérard Larcher affirme que le non-cumul dans le temps pour les parlementaires n’existe qu'au Portugal et au Mexique.
Vrai-Faux : la réforme des institutions tourne au bras de fer.
Le président du Sénat Gérard Larcher mène la Fronde : hors de question pour lui d’accepter une dilution des pouvoirs du parlement. Sa ligne rouge : la limitation du nombre de mandats des élus dans le temps.
"Le non-cumul dans le temps pour les parlementaires, ça n’existe qu’au Portugal, et au Mexique. Et au Portugal c’était lié à l’histoire Salazar".
FAUX. La constitution du Portugal interdit en effet, depuis 1976, l’exercice « à vie » d'une fonction exécutive. Mais les députés, donc la branche législative, ne sont pas concernés, et il sont nombreux, en ce moment, à exercer leur 7ème mandat (le plus ancien député de l’Assemblée de la République siège depuis 1975.) Les maires en revanche, et depuis 2005 seulement, ne peuvent plus se présenter au-delà de trois mandats consécutifs.
Quant au Mexique : les mandats parlementaires étaient limités à un seul, c'est vrai, depuis 1933 (trois ans pour les députés, six pour les sénateurs.) Mais face au désastre, la loi a changé en 2014, et pour la première fois l’été prochain, aux élections législatives, les députés vont pouvoir se représenter. Ils pourront désormais faire jusqu’à quatre mandats consécutifs. Ce changement est applaudi par tous les observateurs, car avec un seul mandat le turnover était délirant, les parlementaires de simples béni-oui-oui qui ne jouaient pas leur rôle. La presse parlait d'un parlement de moutons, et le président faisait ce qu’il voulait.
En fait un seul pays aujourd’hui limite le nombre de mandats des parlementaires : les Philippines, depuis 87. Ça a permis de faire entrer de nouveaux visages à Congrès, avec une réserve toutefois : beaucoup (environ 40%) sont en fait des proches d'anciens députés.
Même si personne ne le fait, les Français sont massivement pour.
Oui, à plus de 90% selon les sondages, et ils ne sont pas les seuls. 75% des américains sont pour, eux aussi. C’est pour cela que Donald Trump en avait fait une promesse phare de sa campagne : pour "nettoyer le marigot", il allait enfin limiter le nombre de mandats au Congrès. Cela n’a pas marché… partout les parlementaires rechignent à voir leurs pouvoirs restreints.
Cela dit, l'exemple américain est intéressant, car une autre tentative avait eu lieu en 1990. La cour suprême l’avait alors rejetée au nom du droit constitutionnel de chacun de choisir ses représentants, mais une quinzaine d’Etats ont conservé le principe d’une limitation des mandats dans le temps à l’échelle de leurs assemblées, et une foule d’études ont été publiées depuis pour en analyser les conséquences. Elles montrent qu'il y a du pour, et du contre.
Au chapitre des "pour" : le personnel politique a été renouvelé, l'argent public est parfois mieux géré... Mais les "contre" semblent l'emporter car on s’est aperçu de vices cachés. Les nouveaux élus ont le même profil sociologique que les anciens (il n'y a donc pas eu de bouleversement), mais comme ils sont moins compétents et qu'ils ne connaissent pas les subtilités législatives, les budgets, ils tombent plus facilement sous la coupe des lobbys, qui se tiennent prêts à les prendre par la main. La vie politique est aussi devenue plus dure, polarisée, car les élus de partis opposés n'ont plus le temps de tisser des liens.
Donc le débat, n'est pas clos, on cherche toujours à trouver le bon curseur.
En France, le gouvernement propose de limiter à trois le nombre de mandats consécutifs que pourra exercer un parlementaire : c'est déjà le cas dans les faits, puisque seuls 7% des parlementaires exercent aujourd’hui en sont à leur quatrième mandat ou plus.
La question, en revanche, reste ouverte pour les maires. Au Portugal, justement, la moitié des maires du pays ont dû abandonner leur écharpe quand la loi a été appliquée pour la première fois, au municipales de 2013. C’est souvent leurs adjoints qui les ont remplacés.