Axel de Tarlé, Géraldine Woessner et Sophie Larmoyer font le point sur l'actualité du jour.
Axel de Tarlé, expert économie
Jamais les compagnies aériennes n'ont gagné autant d'argent dans le monde. Le secteur devrait dégager, cette année, 35 milliards d'euros de bénéfices selon les prévisions de l'Association Internationale du Transport Aérien.
Alors pourquoi Air France va si mal ?
C'est terrible pour Air France, qui va mal, alors que ses rivales sont en pleines forme, c’est une véritable exception.
D'abord, Pourquoi le secteur est en forme ? C’est très simple. De plus en plus de gens prennent l’avion et le trafic augmente chaque année de plus de 5%. Dans le même temps, le coût du kérosène a été divisé par deux alors qu’il s’agit du premier poste de dépense des compagnies aériennes.
Davantage de clients et moins de charge, les bénéfices sont donc logiquement en train de battre des records.
Pourquoi cette formule ne s'applique-t-elle pas à Air France ?
D'abord, Air France n'a pas plus de clients. Depuis les attentats, les réservations ont baissé de 5 à 10% cet été.
Mais surtout, et c'est terrible à dire, Air France n'est plus compétitive face à ses concurrentes. Sur les vols intra-européens, Air France est plus cher que les low-cost comme Ryanair ou Easy Jet et sur les vols long courrier, Air France est plus cher que les compagnies du Golf persique.
Le résultat est sans appel, Air France a enchainé sept années de pertes.
En Bourse, Air France est devenu une PME puisqu’elle vaut désormais 10 fois moins cher que Ryanair.
Quelle est la solution ? Air France est-elle condamnée ?
Les problèmes sont graves.
D'abord, les tensions internes sont telles que toutes tentatives de réforme, se termine à chaque fois par une grève, ce qui est ravageur.
Ensuite, en France, on paye plus de taxes et choisir Air France, c'est choisir de payer encore plus de taxes.
En fait, on est là face aux problèmes de la France : un dialogue social rigide. et des taxes plus élevées.
Mais, le risque c'est qu'Air France devienne une compagnie de deuxième catégorie.
Concrètement, ça veut dire que pour aller loin : En Amérique, en Asie, il faudra désormais passer par British Airways, ou Lufthansa.
Sophie Larmoyer, experte internationale
Le processus semble enfin se mettre en route pour le Brexit. Le ministre des Affaires étrangères, Boris Johnson, l’a glissé dans une interview à Sky News, hier, Londres enverra sa lettre déclenchant le fameux article 50, début 2017.
On sait qu’il était impatient, Johnson, il trouvait que ça n’allait pas assez vite. Il a sans doute "volé" l’annonce à la Première ministre, Theresa May, en parlant à cette chaine de télé anglaise d’où le silence vexé de Downing Street depuis.
C’est donc la lettre de demande divorce qui invoquera cet article 50 du Traité de Lisbonne, qui est le préalable à toute négociation sur les modalités de séparation. Il semble que cette lettre sera envoyée à Bruxelles en janvier.
Donc rien n’a commencé encore ? On en est au point mort ?
Officiellement il n’y a pas encore de négociation mais dans la réalité beaucoup de monde est à pied d’œuvre. Isabelle Ory qui est, depuis Bruxelles, "notre" experte des Affaires européennes à Europe 1, l’a confirmé.
Et ces gens-là, les futurs négociateurs, disent que ce sont des moments très étranges, ils appellent ça "la drôle de guerre".
Parce qu’en coulisse, chacun forme ses bataillons. Le Français Michel Barnier et le belge Didier Seeuws, nommés par la Commission et le Conseil européens, recrutent leurs équipes.
Les Anglais font pareil de leur côté, même s’ils semblent avoir un peu plus de mal. Les meilleurs spécialistes britanniques des dossiers européens sont déjà en poste à Bruxelles mais ceux-là étaient contre le Brexit, ils n’ont pas du tout envie de négocier les conditions de la séparation.
Mais que font tous ces experts, si les négociations ne commencent pas avant janvier ?
En fait travaillent déjà comme des fous. Les équipes fourbissent leurs armes et imaginent toutes sortes de scénario et pour chaque option, en examinent les conséquences.
En tous cas, à voir l’interview de Boris Johnson hier à Sky News, on a l’impression que la partie de poker menteur a bel et bien commencé.
Il affirme avec aplomb que le Royaume-Uni ne sera pas du tout obligé de respecter la liberté de circulation des travailleurs européens pour continuer à avoir accès au marché unique, que tout ça ce sont "des bobards".
En fait de "bobards", c’est justement la première grosse ligne rouge qui est d’ores et déjà tracée, à Bruxelles. Le dialogue promet donc d’être intéressant.
Le calendrier des négociations, c’est deux ans à partir de janvier, c’est ça ?
C’est ça, sachant que les questions les plus sensibles seront sans doute abordées après les élections française et allemandes, avec les nouvelles équipes soit pas avant fin 2017.
Deux ans, cela mène en janvier 2019, en espérant qu’il n’y ait pas besoin d’une rallonge. Personne ne le souhaite parce qu’en juin 2019, il y aura des élections européennes. Il serait donc préférable que le "dossier Brexit" soit alors bouclé.
Géraldine Woessner pour le Vrai faux de l'info
Le vrai-faux de l’info avec Didier Guillaume sous le radar. Le président du groupe socialiste au Sénat, fervent soutient de François Hollande, en a marre que l’on accuse son patron de matraquage fiscal.
Didier Guillaume : "Nous nous sommes faits endormir par les impôts. Fillon-Sarkozy c'est plus 19 milliards. Hollande c'est plus 19 milliards"
19 milliards d’impôts en plus sous Sarkozy et la même chose sous Hollande, c’est vrai ou c’est faux ?
C’est faux, on a passé la journée à éplucher les comptes et à appeler des économistes, personne ne sait d’où sort ce chiffre qui est à la fois, sous-évalué, pour l’un comme pour l’autre, et qui ne reflette pas la réalité.
Quand on parle d’impôts, on parle de beaucoup de choses, en fait. Les impôts qui frappent les ménages, ceux qui ciblent les entreprises et la fiscalité locale bien sûr. Si l’on regarde l’ensemble des prélèvements obligatoires, tout ce que les français paient, les impôts ont augmenté sous chaque quinquennat de 95 milliards d’euros. Pourtant ce chiffre n’est pas fiable car quand la croissance est soutenue, les prélèvements augmentent automatiquement. Or la croissance a été plus forte en moyenne, sous le mandat de François Hollande, que sous celui de Sarkozy. Donc ce que l’on va regarder, c’est la pression fiscale, le taux de ces prélèvements par rapport à la richesse produite. Sous Sarkozy, il augmente d’un point de PIB environ, un rythme deux fois plus soutenu sous François hollande.
Mais est-ce que l’on peut chiffrer précisément les hausses d’impôts de chacun ?
On le peut et c’est étonnant d’ailleurs. Les premières années de son mandat, Nicolas Sarkozy baisse d’abord les impôts avec la défiscalisation des heures supplémentaires, le bouclier fiscal ou l’aide aux ménages, mais dès 2010 la crise est là et il doit redresser les comptes. Il augmente massivement les prélèvements de plus de 40 milliards environ, selon l’OCDE. Une somme qui pèse à la fois sur les ménages et sur les entreprises.
François Hollande, lui, fait un choix totalement différent en misant tout sur la compétitivité. Sous son quinquennat, contrairement aux idées reçues, ce sont les entreprises qui sont a la fête. L’OCDE a recensé 20 milliards, un peu plus, de baisses fiscales, mais en même temps les impôts des ménages ont explosé. Bilan : 27 milliards de plus payés par les Français et ce montant intègre les dernières annonces comme la nouvelle baisse d’impôt sur le revenu des ménages et la baisse du taux de prélèvements obligatoires. Donc minimiser l’ampleur, pour eux, du choc fiscal, ce n’est pas très fairplay.