Chaque matin, Etienne Lefebvre décrypte l'une des actualités économiques marquantes du jour.
Les sociétés d’autoroutes reviennent à la charge pour prolonger la durée de leurs concessions.
Oui c’est la Sanef qui reprend l’initiative. Avec une offre alléchante pour l’Etat. La société des autoroutes du Nord et de l’Est propose de financer 150 millions de travaux entre le périphérique parisien et l’aéroport de Roissy. Une portion ô combien stratégique et qui est dans un état déplorable. Au passage, la desserte du Stade de France et du village olympique serait améliorée pour les JO, alors que la liaison CDG Express, elle, ne sera pas prête. Cerise sur le gâteau, une voie serait réservée au covoiturage. Et il n’y aurait pas de nouveau péage, ni de hausse de tarif entre Paris et Lille. Trop beau pour être vrai ? En échange, la concession serait prolongée, mais de moins d’un an seulement, assure la Sanef.
Qu’en pense le gouvernement ?
Alors ça dépend à quel ministère on s’adresse. Ce qui est sûr, c’est que le dossier des autoroutes est devenu un épouvantail politique. Les conditions des privatisations des années 2000, on le sait, ont été trop favorables, et les prolongations obtenues depuis ont suscité de vives polémiques. Sans parler des "gilets jaunes" qui ont pris pour cible les péages. Mais l’Etat est coincé. Il a 12.000 kilomètres de routes nationales à entretenir, avec peu d’argent et une priorité donnée au ferroviaire. Un rapport l’an dernier proposait, entre autres, l’intégration des voies périurbaines aux réseaux des autoroutes.
Avec remise à niveau à la clef, comme pour le tronçon vers Roissy. Bercy était tenté, le ministère des Transports beaucoup moins. Le rapport a été enterré.
Mais n’y a-t-il pas d’autres solutions ?
Pour certaines rocades, oui, il y a la piste du transfert aux collectivités. Bordeaux, par exemple, est demandeur. Autre idée, bien plus ambitieuse : financer les travaux avec les péages de… 2032. Je m’explique : c’est à partir de cette date que les autoroutes vont revenir progressivement dans le giron de l’Etat. Jean-Baptiste Djebbari, un député spécialiste des transports, propose de créer une société 100% publique pour gérer les autoroutes à cette échéance. Elle emprunterait dès aujourd’hui, grâce à la promesse des recettes futures des péages.
De quoi rénover les routes, et cela préfigurerait déjà le retour de l’Etat. Mais il y a un hic : une directive européenne interdit de maintenir à l’identique les tarifs des péages à la fin des concessions, une fois les travaux amortis. La directive est néanmoins en pleine refonte. Ce scénario mériterait donc d’être étudié de plus près.